L'Education nationale paiera le plus lourd tribut aux suppressions d'emplois en 2010, avec 16 000 postes en moins après 13 500 en 2009 et 11 200 en 2008.
Les 16 000 emplois supprimés concernent essentiellement des postes de fonctionnaires stagiaires, effet direct de la réforme de la formation des enseignants. Celle-ci prévoit un recrutement au niveau "master 2" (bac 5) et une formation incombant aux universités et non plus aux IUFM. Pour la première année d'application, à la rentrée 2010, les étudiants qui auront réussi le concours d'enseignant ne seront donc plus affectés en IUFM mais directement en classe, ce qui permettra d'économiser les postes de stagiaires.
"La poursuite de suppressions qui viennent s'ajouter à d'autres déjà intervenues va dégrader les conditions de travail et réduire les possibilités du service public de faire face aux besoins et de lutter contre l'échec et les inégalités", a réagi à l'AFP le patron de la FSU, Gérard Aschieri. Il fustige "des mesures très marquées par l'idéologie, et paradoxales : hier, Nicolas Sarkozy faisait un discours sur la jeunesse, mais ces suppressions, ce sont des postes en moins pour les jeunes ».
Les effets négatifs sont connus : classes surchargées, manque de remplaçants, baisse de la scolarisation des moins de trois ans en maternelle, déficit de personnels accompagnant les enfants handicapés, etc.
Perspectives peu reluisantes également pour les directeurs d’école qui ne pourront bénéficier d’EVS en nombre suffisant et voient s’éloigner tout espoir de meilleures conditions de décharges de cours.
Ces suppressions de postes ne préparent pas l’avenir. Pourtant, les démographes ont alerté le gouvernement : à partir de 2010 et surtout 2011, le boom démographique ayant débuté en 2000 se fera sentir au collège et la France risque de manquer d’enseignants (relire notre article du 7 août 2009 intitulé « Suppressions de postes d’enseignants : une faute, une tromperie ».
Les suppressions d’emplois dans la Fonction publique d’Etat sont présentées comme un remède indispensable au redressement des finances de notre pays. En réalité, elles ne représentent que 500 millions d’euros d’économies sur les 140 milliards du déficit public !
En 2008, grâce au bouclier fiscal, 834 contribuables dont le patrimoine est supérieur à 15,6 millions d’euros ont profité chacun d’une baisse d’impôt de 368 261 euros. Au total, 14 000 redevables ont bénéficié du bouclier fiscal, pour un coût total pour la collectivité de 458 millions d’euros.
Pour Gérard Aschiéri, "Si l'on compare ce que rapportent les suppressions de postes, environ 500 millions d'euros par an, et les mesures fiscales qui réduisent les recettes de l'Etat, par exemple 2,5 à 3 milliards pour la baisse de la TVA dans la restauration, c'est sans commune mesure", et il déplore qu'il n'y ait "jamais de débat sur l'efficacité comparée de ces choix".
N’existe-t-il donc d’autre solution que le démantèlement des services publics pour combler le déficit public ? Pourtant, des sources d’économies importantes sont possibles et connues : la lutte contre la fraude fiscale, la suppression des niches fiscales, la chasse au gaspillage exorbitant des décentralisations et du train de vie des collectivités locales… Il conviendrait également de redéfinir la contribution budgétaire de notre pays à l’Europe. La France verse chaque année au budget européen 7 milliards d'euros de plus que ce qu'elle en reçoit en retour, aides agricoles de la PAC comprises. En 2013, la perte sèche atteindra 10 milliards d'euros par an.
Nous l’avons maintes fois écrit : la RGPP est avant tout une réforme idéologique. Ses conséquences sont néfastes pour les services publics et en particulier pour l’Education nationale.
Les directeurs d’école sont aussi victimes de cette politique. Tous les ministres savent que l’amélioration du fonctionnement de l’école passe par des mesures en faveur des directeurs. Tous les rapports, sans exception, le confirment. Le refus des syndicats enseignants de reconnaître statutairement leur métier n’est qu’un prétexte rêvé pour tout ministre contraint de serrer son budget.