Décidément, rien ne va plus pour le ministre que Nicolas Sarkozy aimait à citer en exemple au début du quinquennat. Tout semblait alors lui réussir. Considéré comme habile, fin tacticien, il surfait dans les sondages. Au cours de l’été 2007, n’avait-il pas réussi à faire avaler aux syndicats la pilule des 11 200 suppressions de postes en bataillant pour éviter les 17 000 suppressions annoncées… Pour les syndicats enseignants, « le pire était évité ».
A cette époque, pas si lointaine, Xavier Darcos, fort de la confiance du président, gagnait tous les arbitrages en contournant le premier ministre. Grisé par ce premier succès dans un ministère secoué en permanence par des conflits larvés, Xavier Darcos n’a pas su mettre à profit sa bonne étoile pour négocier avec les syndicats le « contrat de progrès » promis par Nicolas Sarkozy qui, durant sa campagne électorale, affirmait vouloir "des fonctionnaires moins nombreux, mieux payés, aux carrières plus variées grâce à une organisation en métiers, en contrepartie de services publics plus efficaces".
Certes, Xavier Darcos a mis en place la Commission sur l’évolution du métier d’enseignant présidée par Marcel Pochard. Mais ses conclusions sont restées lettre morte si bien que le Conseiller d’Etat Marcel Pochard a fait part de ses inquiétudes : « Il y a eu arrière-pensée tactique du ministère », comme nous le disions dans notre article du 7 mars dernier.
Même si le ministre a prévu de consulter les syndicats à ce sujet dans les semaines à venir, l’UMP s’impatiente : un retard a été pris !
Autre mauvaise surprise pour le ministre : les enseignants ne se précipitent pas sur les heures supplémentaires proposées par le gouvernement. Ne seraient-ils pas sensibles au « travailler plus pour gagner plus » ? En fait, il semble bien que personne n’avait pensé à la dimension sociologique du métier d’enseignant. Métier très féminisé dont les personnels recherchent avant tout un équilibre entre le temps de travail professionnel et le temps de travail personnel qu’est celui d’une mère de famille.
Le revers électoral à Périgueux a lui aussi fragilisé le ministre en lui faisant porter la symbolique de la défaite de la majorité présidentielle. Au sein du gouvernement, son étoile a pâli. Il lui a fallu assumer la rigueur budgétaire et les suppressions de postes dans l’Education avec pour conséquence immédiate la chute dans les sondages. Et Xavier Darcos n’est pas au bout de ses peines : la RGPP (Révision générale des politiques publiques) lui impose d’autres mesures difficiles pour les années à venir. Sans contrepartie possible, « les caisses sont vides »…
Dure mission que celle d’un ministre qui doit tenir les promesses du candidat Sarkozy : la suppression du samedi matin, la refonte des programmes, les stages de remise à niveau… Ce faisant, il a ouvert un nouveau front de contestation en agissant dans l’urgence, sans consultation et se retrouve esseulé, avec l’obligation de faire passer les réformes, coûte que coûte.
Enfin, pour couronner le tout, les lycéens qui s’en mêlent ! On le sait, la réforme du bac pro ne passe pas très bien auprès d’eux. De surcroît, cerise sur le gâteau, ils viennent soutenir leurs profs avec un slogan qui fait mouche : « touche pas à mon prof ». En moins d’une semaine, ils parviennent à redonner un élan aux manifestations des enseignants qui revendiquent contre les suppressions de postes. Très vite, ils grossissent les rangs des manifs au point d’apparaître comme les interlocuteurs privilégiés du ministre qui en perd sa capacité à résoudre un problème par la règle de trois.
A vous tournebouler un ministre… Alors qu’il doit rencontrer les représentants des lycéens ce vendredi 11 avril, Xavier Darcos déclare : "Nous allons parler avec les lycéens, mais j'aimerais aussi que l'on parle des syndicats, où sont-ils passés ceux-là, pourquoi est-ce que je me retrouve aujourd'hui confronté directement à un dialogue avec les jeunes ?".
Et d’ajouter : "Il faut peut-être que les syndicats arrêtent de pousser les élèves devant eux, et qu'ils reprennent un peu leurs responsabilités, que nous puissions parler de ces questions (statutaires) avec des gens dont c'est la responsabilité".
Réponse du Snes-FSU, premier syndicat d'enseignants des collèges et lycées : Ces propos "constituent une véritable provocation à l'égard des personnels et leurs organisations syndicales. Faut-il rappeler au ministre les grèves qui ont marqué l'année scolaire sans que s'ouvre la moindre négociation dans le second degré ?".
"Le Snes trouve ces propos d'autant plus inacceptables qu'il demande avec insistance une rencontre urgente avec le ministre depuis le mois de janvier avec une réponse de Xavier Darcos survenue la semaine dernière seulement pour une rencontre le 17 avril !", ajoute le communiqué.
Il y a des jours, comme ça, où rien ne va... Un vrai temps de chien, vous dis-je !