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Le statut de directeur d'école dans les projets présidentiels de 2012

 

Certains candidats ou partis évoquent le statut de l'école et de son directeur.

Qu'en disent-ils ?

 

Marine Le Pen
UMP
UMP & PS

Philippe Poutou 

 

La synthèse et les résultats de la consultation IFOP - GDID sont disponibles sur le site de l'Ifop à l'adresse suivante (cliquer sur le panneau ci-dessous) :

 

 

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23 novembre 2010 2 23 /11 /novembre /2010 17:19

 

Il fut un temps, pas si éloigné, où les mots n’étaient pas assez durs pour décrire les maux du collège unique, considéré comme le maillon faible du système éducatif.

C’est encore le message qu’envoie le Haut Conseil de l’éducation (HCE) dans son rapport annuel remis fin septembre au président de la République. Un message qui n’a rien de véritablement nouveau puisque le constat d’une crise du collège, décrit comme un lieu de violence et de malaise, où se révèlent les inégalités scolaires, est dressé depuis déjà quinze ans. Il le fut plus encore au printemps, à travers le rapport de la Cour des comptes.

 

Ce qui est nouveau dans l’analyse actuelle, c’est l’accent mis sur l’école primaire. « Avant le collège, il y a l’école élémentaire », titre le quotidien « Le Monde » le 22/11. « La hiérarchie des priorités n'impose-t-elle pas de se préoccuper d'abord et surtout de l'école élémentaire ? », se demande l’auteur de l’article qui s’appuie sur différents rapports qui pointent les faiblesses et le recul des résultats de l’école. « Pourtant, chaque nouveau ministre de l'éducation a prôné, à sa façon, le "retour aux fondamentaux", à l'école élémentaire en particulier. Depuis le temps, ce recentrage devrait être opéré ! » poursuit l’auteur.

 

La commission Attali vient également de se pencher sur l’école primaire. « L’école primaire doit être largement réformée. C’est notre premier grand chantier de long terme. » (relire notre article du 4 novembre). Dans son rapport, Jacques Attali indique qu’une « mauvaise école primaire est un obstacle à la croissance ». Parmi ses propositions, il convient, dit-il, de « renforcer l’autonomie et le rôle du directeur d’école ».

 

A leur tour, les politiques se saisissent du thème qui semble porteur. Chacun y va de sa proposition pour améliorer le fonctionnement de l’école primaire.

Ainsi, Jean-François Copé, nouveau Secrétaire général de l’UMP, veut s’attaquer au « tabou de l'illettrisme ».

« Il est donc impératif de s’attaquer à ce grand tabou de l’illettrisme dans notre société. Et cela dès l’école primaire. C’est dans cet esprit que j’ai proposé qu’à la fin du CM2, une «validation des savoirs fondamentaux» soit instaurée afin de vérifier que tous les élèves qui passent en 6e savent lire, écrire, compter. Cela doit redevenir une priorité nationale, la priorité des priorités de notre école ! » Pour atteindre son « objectif de 100% de réussite », le député propose de travailler davantage sur trois leviers :

1/ Faire plus confiance aux acteurs de terrain : en confiant plus d’autonomie aux directeurs d’établissement qui doivent devenir les vrais patrons de leur école. En leur donnant la possibilité de recruter l’équipe éducative, de définir avec eux un projet pédagogique adapté, de dédoubler les classes là où c’est nécessaire… Bref, c’est aux équipes pédagogiques de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour arriver aux 100% de réussite ! Au final, le directeur devra rendre des comptes aux parents et à l’Education nationale.

 

2/ Donner aux maîtres d’écoles les outils pour réussir: dans l’apprentissage, il y a des méthodes qui marchent et d’autres qui ne marchent pas. Il y a toujours des débats homériques entre méthodes globales, syllabiques, semi-globales… Pour moi, ce ne doit plus être une question d’idéologie. Il faut prendre les méthodes qui font leurs preuves et les appliquer. Aujourd’hui, les maîtres d’école sont souvent seuls face à leurs classes, sans retour sur les meilleures méthodes. Ce sera le rôle du directeur de faire partager les bonnes pratiques, d’accompagner la formation des maîtres, d’évaluer les résultats en permanence…

 

3/ Mieux organiser l’année scolaire en n’ayant qu’un objectif en tête: l’intérêt des enfants. L’année scolaire est trop lourde et peu adaptée aux rythmes des enfants. Cela explique en partie le stress et la fatigue de nos écoliers. La France est un des pays où dans une année, il y a le moins de jour de classe (140) et le plus d’heures de cours (913), pour un enfant de 7-8 ans. Par exemple, en Finlande, qui est mieux classée dans les comparaisons internationales, c’est presque 50 jours de plus par an, mais 300 heures de cours en moins! Cela veut dire que les écoliers français ont les journées les plus chargées. Je souhaite que nous nous donnions plus de temps pour apprendre, accompagner les enfants… Le passage à la semaine des 4 jours, c’est pratique pour les parents, mais ce n’est sans doute pas l’idéal pour les enfants. Il faudra probablement revenir à la semaine de quatre jours et demi, en faisant le point école par école pour choisir les solutions les plus adaptées. Et pourquoi ne pas raccourcir un peu les vacances d’été ? L’idée, c’est d’apprendre autant de choses en prenant plus son temps ! »

 

D’autres solutions sont envisagées pour réduire l’échec scolaire. L’AFEV (Association de la fondation étudiante pour la ville née en 1991 de l’envie de lutter contre les inégalités dans les quartiers populaires) vient de se faire connaître du grand public en lançant un appel « pour la suppression des notes à l’école élémentaire ».

Les auteurs de cet appel font état de la « pression scolaire précoce » d’un « système élitiste » de notation qui provoque « fissuration de l’estime de soi, détérioration des relations familiales, souffrance scolaire ». Leur conclusion ? « Devant l’urgence d’apporter des réponses concrètes à la souffrance scolaire, nous devons franchir un palier supplémentaire », estiment les signataires qui réclament la suppression de « la notation à l’école élémentaire qui doit être l’école de la coopération et non de la compétition ».

Appel immédiatement relayé par quelques signataires parmi lesquels Richard Descoings (Directeur de Sciences Po Paris), François Dubet (sociologue, professeur à l'université Bordeaux-II et directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales), Michel Rocard, Eric Debarbieux (responsable de l’Observatoire international de la violence à l’Ecole) et Daniel Pennac (écrivain) qui reprennent des slogans tels que : « l’obsession du classement stigmatise des élèves qu’il enferme dans une spirale d’échec ».

On se souvient que dans les années 70, une première offensive incitait fortement les enseignants à remplacer les notes par un système de cinq niveaux (A,B,C,D,E) qu’ils avaient vite « rebricolé » en un système à 15 niveaux avec des A+ et des A- ….

Philippe Meirieu, pourtant très critique sur l’utilisation des notes n’a cependant pas rejoint les signataires de l’appel. « Je ne pense pas que les notes, à elles seules, puissent être considérées comme responsables de l'ensemble de l'échec scolaire. Les méthodes d'apprentissage sont, bien évidemment, en cause. Et il ne faut pas confondre le thermomètre avec la température. »

Et d’ajouter : « D'une part, je pense qu'il faut supprimer l'évaluation des professeurs telle qu'elle est aujourd'hui pratiquée par les inspecteurs. Cette évaluation est, trop souvent, infantilisante.

D'autre part, je crois que la plupart des professeurs souhaitent véritablement faire progresser leurs élèves. Ils souffrent de ne pas y réussir autant qu'ils le souhaiteraient, et ils pourraient trouver beaucoup plus de satisfaction avec une pédagogie de la réussite plutôt qu'avec une pédagogie de la sanction. »

 

Si le Sgen-Cfdt soutient l’Afev, les autres syndicats se montrent plus prudents et préfèrent mettre l’accent sur les moyens nécessaires à un meilleur fonctionnement de l’école primaire. Leur préoccupation du moment concerne la suppression des EVS aide administrative, « avancée » acquise par la signature du protocole signé par le SE-Unsa en 2006.

Le SE comme le SNUipp se félicitent de l’action menée auprès des parlementaires pour récupérer l’aide administrative à destination des directeurs d’école. Chacun y allant de son communiqué victorieux…

« Budget : une bataille gagnée pour l’aide administrative.

Les interventions du SE-UNSA auprès de l’ensemble des groupes parlementaires pour le maintien de l’aide administrative ont payé.

Un amendement au projet de loi de finances, proposé par le groupe socialiste, a été adopté à l’unanimité avec le soutien du Ministre Chatel.

Réaffectant une partie des crédits « heures supplémentaires » vers le programme « vie de l’élève – encadrement éducatif », cet amendement permet de retrouver le nombre d’emplois aidés de 2010.

Le SE-UNSA engrange ainsi une avancée essentielle et poursuit son action pour que l’aide administrative retrouve toute sa place dans nos écoles. »

 

« Un amendement adopté et voté par l'assemblée nationale permettrait de réduire fortement les suppressions du nombre d’EVS.

C’est entre autre un des résultats de l’action intersyndicale.

Dans le cadre des discussions budgétaires, le SNUipp a rencontré des députés et  des sénateurs et, à chaque fois, attiré l'attention sur la situation des EVS.

Vers un retour du volume d’EVS au budget 2011 identique à 2010 ?

Le budget 2011 prévoyait initialement 133,8 millions d’euros pour financer 38 000 emplois aidés dans l’éducation nationale, en baisse de 4 500 par rapport à 2010. Cette baisse était la conséquence de la hausse de la part du ministère de l’éducation dans le financement des emplois aidés de 10% à 30% au 1er janvier 2011. Un amendement adopté lors du débat budgétaire à l'assemblée nationale a acté le transfert de 20 millions d'euros du programme enseignement public du second degré vers le programme vie de l’élève pour financer des EVS. Ces 20 millions devraient permettre d’augmenter le nombre de contrats aidés EVS de 5 000 et de retrouver ainsi le volume d’emplois de l’an dernier.

Pour l’instant, les missions de ces EVS ne sont pas précisées (aide administrative ou accompagnement de la scolarisation des élèves en situation de handicap). Le débat parlementaire sur cet amendement a mentionné ces 2 missions.

Ce transfert dans le budget de l’éducation ne sera pas suffisant, il faudra également que le budget emploi-travail (programme accès et retour à l'emploi) finance également ces emplois (les 70% restants). Le ministre du budget avance le chiffre de 70 millions d’euros (nos calculs font état de 33 millions). »

 

Ce combat ne peut être suffisant à lui seul. On le sait, les milliers de postes supprimés chaque année, le non-remplacement des personnels, la disparition de la formation initiale et continue, l’absence de statut de l’école et de son directeur… sont autant de mauvais coups portés à l’école.

On ose espérer que parlementaires et intellectuels ne considèrent pas le rétablissement des EVS et la suppression des notes comme des remèdes aux causes de l’échec scolaire et au malaise des directeurs d’école.

Les élus de la nation et les élites bien-pensantes ne devraient-ils pas d’abord se soucier de réorienter la politique éducative du pays afin de s’attaquer, enfin, aux véritables problèmes connus et dénoncés dans tous les rapports.

On attend d’eux qu’ils placent l’école au sommet de « la hiérarchie des priorités ». S’ils ressentent un frisson devant l’ampleur du budget consacré à l’école, qu’ils s’imprègnent des conclusions de l’édition 2010 du rapport de l’OCDE « Regards sur l’éducation » dans lequel la France est de nouveau montrée du doigt en matière d’investissement éducatif.

Selon les comptes de l’OCDE, « un investissement massif dans l’éducation rapporte à la société un bénéfice trois fois supérieur au coût de l’effort consenti », « investir dans l’éducation est une très bonne affaire ». Notamment pour le fisc. « Le retour sur investissement pour les pays qui mettent le paquet est garanti » expliquent encore les experts de l’OCDE… Le message sera-t-il entendu ?

 

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4 novembre 2010 4 04 /11 /novembre /2010 23:31

 

Deux ans après un premier rapport, la commission Attali a remis à l'Elysée, le 15 octobre dernier, 25 nouvelles propositions pour sortir la France de la crise.

Les nouvelles propositions de l’ancien sherpa de François Mitterrand ne remettent pas en cause les 316 recommandations précédentes, mais prennent en compte les effets de la crise.

 

Ce rapport, intitulé “Une ambition pour dix ans, une mobilisation générale pour libérer la croissance et donner un avenir aux générations futures”, donne la priorité à 4 chantiers dont l’un concerne la nécessité d’une réforme de l’école primaire et la création d’un statut de directeur d’école.

 

Nous nous attacherons, ici, à extraire de ce rapport certaines des dispositions qui concernent plus précisément le devenir des directeurs d’école.

 

La France que nous voulons pour 2020

 

Nous ne voulons pas d’une France où le niveau d’éducation recule, comme c’est le cas aujourd’hui, en particulier dans l’enseignement primaire. Ce recul constitue un obstacle à la croissance, dans l’économie de la connaissance et la mondialisation. L’école primaire doit être largement réformée. C’est notre premier grand chantier de long terme.

 

Le système d’éducation a longtemps été un atout de la France. Il ne l’est plus. Des progrès ont été accomplis par la mise en œuvre de notre premier rapport dans l’enseignement supérieur. Il n’en va pas de même pour l’école primaire, où s’aggrave l’échec scolaire, et où recule la mobilité sociale. En particulier, les élèves en difficulté avant leur entrée au CP le restent, dans leur quasi-totalité, par la suite. Ce gaspillage de talents finit par se retrouver dans la population active où un très grand nombre de gens arrivent sous qualifiés : une mauvaise école primaire est un obstacle à la croissance.

 

Pour y remédier, il faut :

- renforcer l’égalité des chances dès la crèche et la maternelle.

- renforcer l’autonomie et le rôle du directeur d’école.

- mettre en place une véritable gestion des ressources humaines de l’éducation.

 

Un niveau d’éducation primaire en régression

Selon des études récentes, en France près de la moitié des élèves en fin de CM2 n’ont pas acquis les capacités en lecture et calcul permettant d’accéder à l’autonomie.

Parmi ces élèves, 15 % souffrent de difficultés particulièrement importantes : lexique très limité, difficultés de compréhension, repères méthodologiques très insuffisants. Malgré des moyens financiers supérieurs à ceux engagés par ses voisins de l’OCDE, les résultats de la France sont médiocres. Le plus préoccupant est la régression du niveau de lecture, d’écriture et de calcul, la France enregistrant en particulier en mathématiques la plus forte baisse de score des pays de l’OCDE entre 2003 et 2006.

Ces lacunes du primaire ne peuvent être rattrapées dans la suite du cursus scolaire. La distribution des niveaux entre élèves, cristallisée à l’issue du CP, se retrouve en fin de CM2 (60% capables, 25 % fragiles et 15% en grande difficulté) puis en fin de secondaire supérieur (64% bacheliers, 20% BEP/CAP seulement et 16% sans diplôme). En particulier, le recul des connaissances mathématiques en fin de primaire risque d’aggraver à terme le déficit d’ingénieurs constaté depuis plusieurs années.

Cette faible performance du système éducatif français est socialement inégalement répartie.

 

Les défaillances de la gestion des ressources humaines et notamment :

 

- l’insuffisance de la formation initiale des éducateurs en crèche et des enseignants en maternelle et en primaire;

- l’inadaptation du système de formation permanente des enseignants : la formation continue des enseignants reste limitée ;

- un système d’évaluation déficient : le Haut conseil de l’éducation, beaucoup trop mesuré dans ses termes, relève qu'il « n'est pas très juste », « peu efficace » et « engendre malaise et parfois souffrance ». En effet, on a des critères d'évaluation insuffisants, des conditions d'inspection différentes, des conditions de prise en compte des tâches autres que d'enseignement individuel non homogènes… ;

- un système d’affectation des enseignants injuste et inefficace, notamment pour les jeunes professeurs envoyés en zones difficiles ;

- une insuffisance de pilotage des établissements qui tient largement à leur trop faible autonomie et à l’absence de pouvoir des directeurs d’écoles. Les directeurs d’établissements ne peuvent adapter leurs fonctionnements, leurs équipes, leurs temps scolaires aux besoins des élèves – alors mêmes que ceux-ci diffèrent fortement. Les professeurs ne peuvent moduler, théoriquement, leurs méthodes d’enseignement et leur prise en charge des élèves en fonction des demandes, alors que des pratiques innovantes peuvent se révéler nécessaires ;

 

PREPARER LA CROISSANCE DE DEMAIN : ASSURER A NOS ENFANTS UNE EDUCATION ET UN ENVIRONNEMENT DE QUALITE

 

Proposition 22 :

Lutter contre l'échec scolaire et l'illettrisme à l'école primaire. Une expérimentation pourrait avoir lieu dans vingt établissements dans chaque académie. Elle est rendue possible par l’article 34 de la loi n°2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école.

La mise en œuvre de cette réforme devra être ciblée sur un nombre limité d’établissements afin d’y affecter les moyens nécessaires et d’en évaluer les résultats.

La mise en place de l’autonomie des écoles primaires, liée à la redéfinition du rôle du directeur d'école, responsable de la réussite des élèves de son école pourrait est la clé de la réussite des élèves à l'école primaire.

 

Accorder un vrai pouvoir de direction aux responsables d’établissements primaires

 

Au plus proche des élèves, de leurs parents et des professeurs, le directeur d’une école doit pouvoir déterminer les objectifs à atteindre en fonction des besoins de ses élèves.

Il sera essentiel de prévoir une formation adaptée et l’instauration d’un statut particulier pour les directeurs d’école. Cette nouvelle formation pourrait être majoritairement accessible aux professeurs des écoles, déjà directeurs ou non, mais aussi aux conseillers pédagogiques. Les directeurs d'école devront être formés à la gestion d'équipe et aux relations avec les parents.

Le directeur d’école devra pouvoir, d'abord, intervenir directement dans le recrutement des équipes pédagogiques, sur lesquelles il doit ensuite avoir une réelle fonction de direction et de mobilisation dans le cadre d’un projet d’établissement.

 

- Le recrutement de son équipe

Un prérequis au recrutement par les directeurs des professeurs est la nécessaire qualité de la formation à la fois théorique et pratique, disciplinaire et pédagogique des enseignants à l’université. La maquette actuelle de la masterisation ne semble pas répondre actuellement à cet objectif.

Le système éducatif finlandais se caractérise par une "forte autonomie des établissements, des enseignants et des élèves". Dans ce cadre, le recrutement des enseignants est assuré par une décision du directeur sous le contrôle des conseils associant des représentants des parents, des enseignants et du personnel.

Cette solution permettrait d’éviter des affectations inadéquates, par exemple de jeunes professeurs sans expérience dans les établissements les plus difficiles.

Celle-ci prévoit que « sous réserve de l'autorisation préalable des autorités académiques, le projet d'école ou d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations, pour une durée maximum de cinq ans, portant sur l'enseignement des disciplines, l'interdisciplinarité, l'organisation pédagogique de la classe, de l'école ou de l'établissement, la coopération avec les partenaires du système éducatif, les échanges ou le jumelage avec des établissements étrangers d'enseignement scolaire ».

 

- L’évaluation de son équipe

Le directeur, sera le supérieur hiérarchique des personnels de son école et devra participer à l’évaluation des enseignants, comme le fait un principal de collège et à l’affectation de ceux-ci devant les classes de son établissement.

En cas de faiblesse d’un professeur, une formation obligatoire devrait pouvoir lui être proposée en dehors du temps scolaire, en accord avec l’inspecteur d’éducation nationale.

 

- La responsabilité des résultats des élèves de son école

Le directeur doit être responsable des résultats des élèves de son école, par rapport aux compétences devant être acquises. Cela suppose un renforcement des évaluations nationales au niveau du CE1, fin du cycle d’apprentissage de la lecture et au niveau du CM2.

 

- La mise en place d’expérimentations pédagogiques pour assurer la réussite des élèves

A partir des résultats des évaluations nationales, le directeur doit pouvoir mieux piloter ses ressources, organiser le travail des équipes pédagogiques, organiser le temps scolaire et participer à des expérimentations en matière de pédagogie innovante pour réduire l’échec scolaire.

Le choix du rythme scolaire en 4 ou 4 jours et demi, sera déterminé par le directeur.

Enfin le directeur pourra participer à des expérimentations en matière de pédagogie innovante.

 

- L’implication des parents par le directeur, comme co-acteurs de la réussite scolaire de leurs enfants. Le directeur d’école pourrait alors proposer aux parents de mieux les associer, sur le modèle d’une expérimentation menée et évaluée avec succès « la mallette des parents ».

 

Les directeurs pourraient entreprendre des actions pour :

 

- mieux expliquer aux parents le fonctionnement de l’école (à quoi servent les cours, quels sont leurs objectifs, comment fonctionne le système d’orientation). L’école leur expliquerait aussi ce qu’elle attend d’eux (suivi des devoirs, carnets de notes…) ;

 

- offrir un espace d’écoute, par des professionnels, des professeurs ou d’autres parents d’élèves bénévoles aux parents à l'école permettant de dépasser les situations de parents très démunis face à la détresse de leurs enfants, en échec dans le système scolaire. Des conférences sur l’alimentation, les rythmes de l’enfant, l’apprentissage de l’autorité pourraient être organisés pour donner des clés indispensables aux parents ;

 

- ouvrir les locaux de l'école à des ateliers pour les parents, qui leur permettront d’accompagner de leurs enfants, dans des matières fondamentales: orthographe, calculs de base, grandes dates de l'histoire, outils informatiques…

 

Mettre en place des établissements primaires d’enseignement public (EPEP)

 

Il ne sera pas possible de mettre en place un directeur d’école, déchargé de sa mission d’enseignement, si l’école n’a que peu de classes ou que quelques niveaux.

La création d’une nouvelle fonction de directeur d’école est indissociable de la création des établissements publics d’enseignement primaire (EPEP), regroupant différentes écoles, permettant d’atteindre une taille critique des écoles.

Ces EPEP pourrait regrouper plusieurs écoles de plusieurs communes qui n’offrent pas un enseignement dans tous les niveaux. Le nouveau directeur pourra superviser, en étant mobile, les différentes « écoles » de l’EPEP.

Des évaluations devront être menées pour mesurer l’efficacité de cette mesure. Ces évaluations devront faire l'objet d'un suivi continu, tant sur le plan individuel (méthodes des enseignants, management des directeurs, etc.) que collectifs (ouverture de l'école, pratiques collectives, etc.) tout au long de l'expérimentation. Elles devront aussi faire l'objet d'une évaluation à moyen et long terme. Ces évaluations devront reposer sur des objectifs de résultats, et prendre en compte la satisfaction des élèves, enseignants, parents et de l'ensemble de l'équipe de l'établissement. Les bonnes pratiques pourront ainsi faire l'objet d'une diffusion.

 

Proposition 23 : Améliorer la gestion des ressources humaines de l’éducation

Moderniser l’évaluation des enseignants en intégrant l’engagement personnel des enseignants et tirer les conséquences de cette évaluation sur la carrière.

L'évaluation devrait être modernisée pour la rendre plus juste et plus efficace, sanctionnant des carrières fondées sur le mérite et l'investissement personnel. Elle devrait notamment mieux prendre en compte les résultats des élèves et être plus régulière. Les critères d'évaluation doivent prendre en compte l'aptitude des professeurs à faire évoluer les élèves.

 

Redéfinir les obligations de service des enseignants

Des décrets de 1950 ont défini le service des enseignants uniquement en horaire hebdomadaire d'enseignement98 et non en temps de travail. Le temps de correction, de préparation et de présence dans l'établissement n'est donc pas décompté.

La mission des enseignants ne se limite pourtant pas à l'activité d'enseignement.

Ainsi l'accompagnement des élèves, la relation avec les familles, l'aide à l'orientation, le travail en équipe ou par discipline ou les conseils de classe, conseils de cycle en primaire (particulièrement important pour le cycle de la lecture grande section, CP, CE1) sont des missions essentielles des enseignants.

Progressivement, il faudrait pouvoir renforcer les obligations de service des enseignants en ajouter au volume d’heures d’enseignement des heures de concertation et de tutorat.

Par ailleurs, le passage du calcul hebdomadaire des heures d’enseignement des enseignants à une annualisation du temps de travail permettrait de rendre plus flexible la gestion des ressources humaines…

 

L’Institut Montaigne recommande au Gouvernement de mettre en œuvre sans délai les propositions du "rapport Attali" sur l'école primaire. (relire notre article du 5 mai 2010 intitulé « L’Institut Montaigne favorable aux EPEP et à un vrai statut de directeur »)

 

Pourtant, rien de comparable cette fois avec la médiatisation de la remise officielle du premier rapport en 2008. Un seul rendez-vous avec le président de la République. Un bref communiqué. Pas de conférence de presse. On sait que Jacques Attali n’est plus en odeur de sainteté à l’Elysée. Pour l'un des membres de la commission Attali, interrogé dans les Echos, « cela ressemble à un enterrement de première classe du rapport ».

 

Côté UMP également, l’école et son directeur sont au centre des préoccupations du « Rendez-vous pour la France », premier signe du lancement de la campagne présidentielle.

Fidèle à ses habitudes de bateleur, Gérard Longuet affirme tout de go que « ce qui manque à l'Ecole ce ne sont pas des moyens mais des chefs ». « On a besoin de vrais établissements au primaire, avec de vrais directeurs et des élus locaux impliqués », insiste-t-il. L’école doit avoir un patron et un vrai... « Pour qu'il y ait établissement, il faut comprendre qu'il n'y aura d'autonomie que si le chef rentre dans les classes et évalue les enseignants. Ce travail doit déboucher sur la cohésion ou la séparation ». Rien de moins !

Même son de cloche chez Jean-François Copé : « Il faut faire du chef d'établissement le pivot de l'organisation. Il doit être le patron et gérer les enseignants. Il faut qu'il puisse constituer son équipe".

 

Le SE-Unsa a immédiatement réagi : « …pour l’UMP, l’autonomie, ce n’est pas celle de la communauté éducative, c’est celle du chef : autonomie dans le recrutement des professeurs, autonomie budgétaire, y compris sur la répartition des moyens horaires, et autonomie pédagogique. Pour le SE-UNSA, cette conception « managériale » de l’autonomie est aux antipodes des démarches collaboratives plus que jamais indispensables. Qui plus est, cette autonomie ne s’accompagne d’aucun moyen pour mettre en œuvre des pédagogies de la réussite… ».

 

Faut-il prendre au sérieux tous ces propos de campagne ? On connaît les déclarations tapageuses du sénateur Gérard Longuet. On ne peut, non plus, oublier que la période est à la mobilisation des militants égarés. Les poubelles de l’histoire sont pleines de paroles et de promesses démagogiques oubliées dès le soir du scrutin…

 

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19 octobre 2010 2 19 /10 /octobre /2010 12:13

 

 

Certes, l’heure est à la lutte contre la réforme des retraites plutôt qu’aux réflexions sur l’Education. Néanmoins, il nous semble important de faire le point sur les attentes des enseignants, et parmi eux, des directeurs d’école, et les suppressions de postes qui se poursuivent à un rythme accéléré. Même si les médias ne s’en font plus l’écho, la politique budgétaire continue son travail de coupes sombres dans l’Education nationale.

Nous avons décidé de mettre l’accent sur trois points importants qui concernent particulièrement les directeurs d’école.  

 

 

Rapport Reiss

 

Commandé au printemps par le Premier ministre, ce rapport de Frédéric Reiss (UMP, Bas-Rhin) est intitulé "Quelle direction pour l'école du XXIe siècle ?". Il avait notamment pour objectif d'"examiner la fonction et le statut d'un directeur d'école, le statut des écoles de grandes tailles et des regroupements d'écoles".

Le rapport souligne qu'être directeur d'école est "un métier à part entière", et pas seulement une fonction, ce qui implique "un plan de carrière" et une "nette revalorisation de la rémunération indemnitaire".

M. Reiss propose également de créer ou expérimenter plusieurs regroupements, en fonction de la taille de l'école.

Dans un communiqué, le ministre de l'Education nationale Luc Chatel a affirmé que "certaines" des propositions allaient "pouvoir être mises à l’étude, en écho avec la préparation d’un plan numérique pour l’école, en relation avec la réflexion sur les rythmes scolaires ou en complément du plan de lutte contre l’illettrisme", sans autre précision.

Parmi les recommandations : le rapprochement de "petits collèges et des écoles de leurs secteurs de recrutement" afin de créer des "écoles du socle commun". Mais cette disposition du rapport ne devrait pas être reprise avant plusieurs années par le ministre qui, suite au rapport du HCE sur le collège, a déclaré : "Nous n'allons pas faire une grande réforme du collège d'ici à 2012 (...), mais nous pouvons avancer sur certains sujets", a affirmé Luc Chatel. "Dès la prochaine rentrée, nous pouvons avancer dans deux directions : une plus grande personnalisation des enseignements et une action sur l'orientation".

Trois semaines se sont écoulées depuis la publication du rapport du député Frédéric Reiss. Nous avons longuement rendu compte du constat fait par le député et des principales propositions et suggestions que contient son rapport. Un rapport qui a suscité de nombreux commentaires, notamment de la part des directeurs d’école, principaux intéressés par le compte rendu de la mission.

Le soufflet semble retombé. Les syndicats sont absorbés par la réforme des retraites. Le ministre ne semble pas décidé à entreprendre une quelconque réforme de l’Education nationale à quelques mois du début de la campagne présidentielle. Le Président de la République, futur candidat à sa propre succession, n’a aucun intérêt à ouvrir de nouvelles discussions sur un sujet brûlant.

 

 

Nouvelles menaces sur les EVS

 

Ainsi que nous l’écrivions le 9 septembre dernier dans un article intitulé « l’aide administrative aux directeurs d’école remise en cause », les recteurs ont reçu pour consigne de réduire les contrats aidés. Malgré les protestations des syndicats, rien n’y fait : de nouvelles menaces se précisent sur les contrats aidés.

Discrètement mais inexorablement, les postes sont supprimés par centaines, voire par milliers, au fur et à mesure que les contrats viennent à échéance. Les syndicats évoquent entre 600 et 700 contrats qui doivent disparaître dans les semaines qui viennent dans les seules Bouches-du-Rhône (soit un tiers des EVS), 130 dans le Tarn, 420 dans le Val d'Oise, 200 en Haute Garonne, 90 dans la Drôme, 300 en Haute Loire... Selon l'Unsa, un tiers des départements est actuellement touché par les suppressions, mais tous devraient l'être dès janvier prochain. Les missions n’ont pas disparu pour autant, que ce soit en école, collège ou lycée : assistance administrative, assistance handicap, surveillance...

A l’origine des emplois administratifs d’aide aux directeurs d’école, le SE-Unsa considère que sa signature apposée au bas du protocole d’accord en 2006 est reniée par l’actuel ministre. Le SNUipp, le SNE, FO et le GDID ont également protesté. Dans un courrier adressé au ministre, le SE-Unsa a menacé le ministère d’un "conflit sérieux".

« Nous vous demandons, Monsieur le Ministre, de revoir de toute urgence ces situations et les consignes que vous avez données. Si les notifications de suppression ou de diminution de ces emplois devaient être maintenues, vous ouvririez la voie à un nouveau conflit sérieux dans les semaines à venir. Depuis 2006, la charge et les responsabilités des directeurs d’école ne se sont pas amoindries. Sachez que le SE-UNSA et les directeurs sont déterminés à voir rapidement rétablie l’aide administrative dont ils ont besoin. »

Rien n’y fait. Le gouvernement reste sourd aux injonctions syndicales et poursuit sa politique de réduction des effectifs aussi bien en termes d’enseignants qu’en emplois aidés. Les budgets 2011-2013 le prévoient.

 

 

Projet éducatif du PS

 

Dans son édition du 18 novembre, le journal Le Monde titrait : "Education : le PS propose une rupture dans sa vision de l'école".

Le quotidien du soir Le Monde révèle le programme éducation que le Parti socialiste va présenter à ses militants. Intitulé "Education et formation pour l'égalité". Il constituera le socle du programme éducatif du candidat à la présidentielle de 2012.

Commentant le projet, Bruno Julliard, Secrétaire national à l’éducation, annonce une priorité absolue à l'école primaire et à la petite enfance.

 

Trois priorités sont proposées par le Parti socialiste :

- le primaire, où le PS estime nécessaire de concentrer des moyens pour prévenir l'échec lourd ;

- les établissements difficiles, où les moyens ne doivent plus être uniformes mais distribués en fonction des besoins des établissements et des projets qu'ils mettent en œuvre la transformation du métier d'enseignant

- la transformation du métier d'enseignant

 

 

Parmi les principales mesures de ce projet :

 

Cinq jours d'école.

Le texte propose de mieux répartir les heures de cours sur l'année et la journée en raccourcissant les vacances d'été, en organisant une semaine de cinq jours éducatifs comprenant un temps de loisir culturel et incluant les devoirs du soir.

Bruno Julliard apporte certaines précisions :

"Il n'y aura pas d'efforts supplémentaires demandés aux enseignants, qui ne seront pas reconnus, notamment financièrement. Cependant, beaucoup de professeurs des écoles voient les conséquences de la semaine des quatre jours comme des difficultés supplémentaires dans l'exercice de leur métier. Les enfants sont plus stressés et plus fatigués par des horaires incohérents et beaucoup trop chargés.

Je rappelle cependant que nous proposerons cinq jours éducatifs où la totalité de ces cinq jours ne nécessitera pas la présence des professeurs des écoles. Bien évidemment, rien ne se fera sans consultation des enseignants et de leurs organisations syndicales. Nous y ajouterons également les collectivités locales, les associations d'éducation populaire, mais aussi et surtout les parents.

Nous ne proposons pas le retour de l'école le samedi matin. En revanche, nous considérons que la suppression du samedi matin et la mise en place autoritaire des quatre jours d'école par le gouvernement actuel sont une erreur.

Nous proposerons donc que la semaine s'organise autour de cinq jours éducatifs pour tous. Il y a nécessité d'augmenter le nombre d'heures et de jours scolarisés pour les élèves, particulièrement pour les élèves fragiles scolairement.

C'est pourquoi nous proposons d'allonger l'année scolaire en diminuant les vacances d'été et en passant la semaine de quatre à cinq jours. Le cinquième jour sera probablement le mercredi, même si nous souhaitons que les projets éducatifs locaux permettent d'organiser ces cinq jours éducatifs.

Il ne s'agit pas forcément de cinq jours pleins devant un professeur des écoles pour les élèves, mais nous devons y intégrer des activités scolaires ou périscolaires qui, pour beaucoup, auront lieu dans les murs de l'école, mais qui ne seront pas forcément sous la responsabilité directe des enseignants.

Nous voulons faciliter les transitions entre les temps scolaires, les temps périscolaires et les temps privés."

 

Un collège sans redoublement.

Dans le collège rénové, on ne redoublera plus, les enseignements seront plus transversaux, les parcours individualisés et des métiers nouveaux créés pour aider les plus en difficulté, au côté d'enseignants surnuméraires. "Nous proposons la participation d'enseignants du primaire au collège et réciproquement dans le cadre de projets communs", précise aussi le texte.

 

Des enseignants revalorisés avec contrepartie.

Les enseignants se voient proposer une nouvelle définition de leur métier. Il s'agit de prendre en compte l'ensemble des tâches qu'ils réalisent et non plus seulement leur nombre d'heures de cours. La possibilité d'enseigner deux disciplines en collège est évoquée. Les enseignants pourraient choisir au cours d'une formation initiale reconstruite, de s'initier à l'enseignement d'une seconde discipline. Et à la clé de tout cela, il y aurait une revalorisation.

 

Des établissements plus autonomes astreints à plus de mixité.

La nouvelle architecture proposée passe par l'octroi de plus d'autonomie pour les établissements, la dotation horaire devant laisser une marge de manœuvre aux équipes éducatives pour renforcer leur projet. En revanche, les établissements devront panacher le recrutement de leurs élèves. "Il faut dépasser la logique strictement territoriale et introduire des critères sociaux et scolaire dans le nouveau dispositif de sectorisation, notamment en créant un indice de mixité sociale", précise le document.

 

Astreindre l'enseignement privé à des contraintes.

"Une juste contrepartie du financement public dans les établissements privés sous contrat impose qu'ils soient soumis aux mêmes objectifs de mixité, et donc qu'ils entrent dans la sectorisation", précise Bruno Julliard. Aujourd'hui, les enseignants du privé sous contrat sont payés par l'Etat, mais les établissements choisissent librement leurs élèves. Tous les établissements scolaires, y compris l'école privée, devront se conformer à des objectifs de mixité sociale et scolaire.

 

Une seconde chance.

Chaque sortant du système éducatif doit partir avec en poche un compte formation individuel à deux étages. Le premier étage étant un complément à sa formation initiale utilisable dans les deux ans après la sortie de la formation, le second serait utilisable tout au long de la vie.

 

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3 juin 2010 4 03 /06 /juin /2010 23:44

 

Rarement sans doute l’école aura autant été au cœur des débats. Face à la polémique qui fait rage depuis la révélation du plan gouvernemental pour dénicher 16 000 postes à supprimer en 2011, un événement majeur pour les directeurs est survenu cette semaine. Quatre syndicats (SE-UNSA, SGEN-CFDT, SCENRAC-CFTC, CFE-CGC) et le GDID ont signé un texte commun pour demander au Ministère l’ouverture d’une « concertation sur toutes les dimensions de la direction et du fonctionnement d’école. »

 

Ce texte est important à plus d’un titre. D’abord parce qu’il est une véritable reconnaissance institutionnelle du GDID comme partenaire incontournable représentatif des directeurs d’école. Ensuite parce qu’il est l’aboutissement d’un long travail de persuasion qui a réussi à convaincre les organisations syndicales de l’urgence de reprendre le dossier de la direction d’école. Enfin parce qu’il est une force de proposition positive pour améliorer réellement le fonctionnement de l’école alors qu’il est généralement plus facile de s’entendre pour dénoncer que pour proposer.

 

Ce texte est également important car il traduit une évolution de la perception du directeur d’école dans le système éducatif. De nombreux rapports ont mis en évidence les difficultés du métier, souhaité qu’il soit reconnu, que ses missions soient clarifiées et que soient donnés au directeur les moyens de mieux remplir son rôle. Début mai, l’Institut Montaigne dénonçait « l’absence de pilotage de l’école primaire » : « Le directeur d’école primaire ne dispose ni de l’autorité lui permettant d’assumer une réelle responsabilité pédagogique, ni des moyens suffisants pour remplir ses responsabilités administratives. Il ne dispose pas non plus d’une reconnaissance statutaire ».

 

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Texte commun

 

Depuis des années, enquêtes et sondages (Ministère, MGEN, DGESCO, syndicats, IFOP, etc...) ont mis en évidence :


- l'aggravation du malaise des directrices et directeurs d'école

- la désaffection continue pour cette fonction

- la difficulté de pérenniser les équipes pédagogiques et de fonder dans le temps les divers projets des écoles

- les dysfonctionnements et difficultés de fonctionnement de l'École Publique que cette situation engendre  

Face à cela, les projets actuels d'EPEP ne garantissent pas l'indépendance du projet pédagogique ni le maintien de structures de taille raisonnable et d'un réseau scolaire de proximité. Ils ne répondent donc ni aux attentes des directrices et directeurs d'école, ni à celles des équipes pédagogiques, ni à celle de l'ensemble des personnels.


La direction d'école, aujourd'hui, doit conjuguer Etre et Avoir


Répondre aux questions :

- du temps de décharge car la charge de travail est trop lourde

- des moyens et du matériel

- de l'amélioration de la formation initiale et continue

- de l'augmentation de la rémunération des directeurs d'école


Par ailleurs, il est nécessaire de :


- clarifier et préciser les responsabilités des directrices et directeurs d'école

- revoir le décret de 89 inadapté et obsolète face à l'empilement des responsabilités et aux évolutions de l'école, notamment dans ses relations avec les communes

- redéfinir le cadre juridique, administratif, légal de la direction d'école

- répondre aux besoins de reconnaissance des directrices et directeurs d'école  


Parce que l'adaptation de la réalité de l'École Publique aux nécessités de notre temps, et les difficultés rencontrées par nos collègues dans l'exercice professionnel l'exigent, nous demandons au Ministère d'ouvrir une concertation sur toutes les dimensions de la direction et du fonctionnement d’école.

Thierry CADART Secrétaire Général du SGEN-CFDT

Christian CHEVALIER Secrétaire Général du SE-UNSA

Franck GIRARD Président d’Avenir-Ecole CFE-CGC

Michel TRUDEL Président du SCENRAC-CFTC

Alain REI Président du GDID

 

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Comme il est dit plus haut, la polémique ne cesse d’enfler depuis la divulgation du plan confidentiel intitulé « Schéma d’emplois 2011-2013 ».

Partis politiques, organisations syndicales et associations sont vent debout contre le projet néfaste du gouvernement. Pour le PCF, il s’agit d’un « plan de sabotage d’une violence inédite ». Le PS fustige l’attitude « cynique et brutale » du gouvernement : « rarement la chasse aux économies aura fait aussi peu de cas de l’intérêt des élèves et de toute réflexion sur les finalités de l’école ».

Pour la CGT, c’en est trop : « tailler dur dans le système éducatif fait courir un grand risque à la France pour les décennies à venir ».

« Pour le gouvernement, l'éducation n'est qu'un coût, la jeunesse n'est qu'une charge, voilà comment se prépare l'avenir du pays : c'est irresponsable et scandaleux », déclare le Sgen-CFDT. Le SNUipp dénonce une « véritable hémorragie d’emplois ». Pour le SE-Unsa, « rien n’échappe à cette chasse budgétaire qui explore les moindres recoins du système éducatif. Pour le SE-UNSA, le dogme du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux montre là toute son absurdité. La recherche d’économies budgétaires broie désormais toute ambition éducative pour notre pays. Alors que la crise imposerait un investissement éducatif hors du commun, c’est exactement le choix inverse qui est fait ».

 

Les syndicats d’inspecteurs ne sont pas en reste. Le SNPI-FSU voit dans le schéma d’emplois « un ensemble de mesures dont les conséquences seront désastreuses pour la réussite scolaire des élèves. Le système éducatif déjà ébranlé par les mesures précédentes n’a jamais été aussi gravement menacé ».
Le SI.EN-UNSA Education interpelle solennellement le ministre : « les mesures envisagées, au-delà de leur froideur technocratique, ne sont pas que néfastes : elles sont criminelles pour l’Ecole. Il est encore temps aujourd’hui d’arrêter le massacre du service public… Demain, il sera trop tard ! »

La FCPE appelle à une riposte commune du collectif « l’Education est notre avenir » contre ces mesures. La PEEP « sollicite une audience auprès du ministre de l’Education pour faire le point sur les mesures envisagées et lui faire part de l’inquiétude légitime des parents ».

L’AGEEM fait le constat suivant : « AUCUNE COHERENCE pour améliorer le service public d'éducation qui en a tant besoin, pour donner de l'élan à l'Ecole dans l'intérêt des enfants/élèves et leurs familles et dans le respect des enseignants. BEAUCOUP DE COHERENCE dans les actions destinées à démanteler, à détruire les acquis de l'ECOLE de la REPUBLIQUE ».

 

Le débat sur les moyens, notamment la question du nombre d’élèves par classe est au centre d’une polémique. Contrairement au ministre, le chercheur Pascal Bressoux, qui dirige le laboratoire en sciences de l'Education de l'Université Pierre-Mendès-France de Grenoble est catégorique : « Les études montrent que la réduction de la taille des classes a un impact très significatif sur les acquis des élèves, par exemple, en français et en mathématiques, mais aussi sur les facteurs comportementaux: ils travaillent plus en cours ».

Idem pour Thomas Piketty de l’école d’économie de Paris qui rappelle son étude de 2006 sur ce sujet « je montrais qu'en primaire, on apprend mieux à lire et à calculer quand on est 20 au lieu de 25. C'est encore plus vrai pour les enfants de milieux défavorisés ».

Luc Chatel a beau dire que « la question des moyens, toujours les moyens, n’est pas la réponse aux problèmes de l’éducation nationale. C’est une question d’organisation, d’efficacité du système », rien n’y fait. Il ne parvient pas à convaincre que les réformes entreprises le sont dans le but d’améliorer ou de rendre plus efficace le système éducatif français.

« Ce n'est pas de l'éducation, c'est de la comptabilité », estime, pour sa part, Christian Chevalier, secrétaire général du SE-Unsa.

 

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21 mai 2010 5 21 /05 /mai /2010 17:03

 

La Cour des Comptes a publié récemment son rapport public thématique intitulé : "L’Éducation nationale face à l‘objectif de la réussite de tous les élèves".

 

Le rapport dresse un constat sans appel de l’échec du système scolaire à réduire les inégalités entre élèves. L’école a réussi le pari de la massification mais pas celui de la démocratisation, c’est-à-dire l’engagement à soutenir la réussite des élèves les plus en difficulté, assène Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes, lors de la présentation publique du rapport mercredi 12 mai.

Au regard des moyens investis (3,9 % du PIB), comment le système éducatif français parvient-il à des résultats aussi médiocres ? A savoir : l’un des taux de retard scolaire les plus importants pour les élèves de 15 ans, un élève sur cinq ne maîtrisant pas la lecture au sortir de sa scolarité, un sur six qui quitte le système scolaire sans qualification aucune, ainsi qu’un taux de redoublement qui place la France en tête de peloton dans la catégorie !

 
En résumé, la France s’affiche comme le pays occidental le plus éloigné de l’objectif d’égalité des chances, estime Didier Migaud. Il existe, certes, des programmes de réussite éducative, d’accompagnement éducatif et d’aide personnalisée mais l’Etat a tendance à privilégier les effets d’affichage en multipliant les dispositifs de remédiation, de soutien ou d’accompagnement. Or, la réalité, c’est que l’on a deux fois moins de collégiens qui bénéficient de programmes de réussite éducative que de collégiens qui sortent du système éducatif sans aucune qualification, souligne le premier président de la Cour des comptes.

 

Le système scolaire n’en finit plus d’être remis en cause ! Les conclusions du rapport de la Cour des comptes ont en effet pour toile de fond les travaux en cours de la commission sur les rythmes scolaires, les annonces présidentielles autour de la lutte contre le décrochage scolaire, celles issues des Etats généraux de la sécurité à l’école concernant le choix de l’équipe pédagogique par les directions d’établissements en REP, ainsi que la récente nomination du référent illettrisme.

Les préconisations de la Cour des comptes font en outre écho au constat du récent rapport de l’Institut Montaigne, « Vaincre l’échec à l’école primaire », selon lequel l’école primaire accroît les inégalités sociales et qui insiste notamment sur la nécessité de revoir les rythmes scolaires, ainsi que l’octroi d’un statut et d’un pouvoir de pilotage au directeur d’école.

 

Parmi les nombreuses remises en cause : le manque de marge de manœuvre des établissements scolaires. La Cour des comptes préconise donc une réforme de l’organisation du système scolaire français, fondée, entre autres, sur l’autonomie des établissements scolaires dans la gestion de leurs moyens.

 

Fait inhabituel, le ministère de l’Education nationale a promptement réagi au rapport de la Cour des Comptes. Il a tenu à répondre sur de nombreux points soulevés par les magistrats.

« Les développements sur le manque d’autonomie des établissements et sur l’insuffisance de l’approche pluridisciplinaire ignorent largement les réformes structurelles en cours et l’évolution des pratiques au sein des Etablissements publics locaux d’enseignement.

Par ailleurs, l’autonomie renforcée des établissements publics locaux d’enseignement, notamment, en matière d’organisation des dispositifs d’accompagnement et d’utilisation des heures laissées à leur disposition, a conduit à renforcer le rôle du conseil pédagogique ».

 

L’enquête de la Cour met en avant « l'effet établissement » pour justifier d'augmenter l'autonomie administrative. D'autres travaux lui opposent « l'effet professeur » même s’ils estiment que « l’effet établissement » est bien réel. Ils s’interrogent également sur la question du rapport entre l'effet établissement et l'autonomie de gestion ?

 

Sur le terrain pédagogique, la question que pose l'autonomie c'est celle du pilotage. Et l'autonomie accrue ne peut réussir que si elle est accompagnée d'un pilotage renforcé et au plus proche. 

 

Plus audacieux, la Cour propose de faire déterminer par les équipes pédagogiques les modalités de répartition des moyens pédagogiques avec, en contrepartie, un nouveau système d’évaluation des établissements et plaide pour « un effort exceptionnel en faveur des établissements confrontés à la plus grande difficulté scolaire ».

 

Les auteurs du rapport souhaitent aussi une affectation « sur profil » des enseignants ou de directeurs des établissements les plus difficiles. « La Cour propose de repenser la gestion d’ensemble du système scolaire, de l’administration centrale aux équipes éducatives, en l’adaptant à l’hétérogénéité des élèves », résume Didier Migaud.

 

Pour le SNUipp, « le compte n’y est pas ! »

 

« Bien que ce rapport ne révèle que peu d’éléments réellement nouveaux, il confirme ce qu’expriment au quotidien les enseignants des écoles : inadaptation des rythmes depuis la réorganisation de l’école, sentiment d’abandon dans les zones prioritaires, moyens insuffisants, absence de bilan des dispositifs mis en œuvre...

Le SNUipp partage les préoccupations de la cour d’accroître les moyens alloués au primaire, de prendre en compte des besoins des élèves, de remettre à plat l’organisation du temps scolaire et d’engager un effort exceptionnel en faveur des établissements confrontés à la plus grande difficulté scolaire. Il déplore que ces préconisations s’effectuent à moyens constants.

En revanche, pour le SNUipp, la volonté d’accorder davantage d’autonomie aux établissements et la préconisation d’un pilotage en fonction d’objectifs à court terme ne peuvent constituer des propositions efficaces pour la réussite de tous.

En tout état de cause, il demande au Ministère de l’Education d’engager de véritables discussions, notamment en faveur d’une véritable relance des zones d’éducation prioritaire, et de remettre en cause le dogme du non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.
Ce sont également ces exigences que porteront les enseignants lors de la journée de grève du 27 mai.

Le SNUipp y voit « d’autres raisons plus profondes. Et notamment celle de transformer l’école en une entreprise gérée comme une autre. »

Pour ce syndicat, « cette tendance est lourde, massive, générale. Et les réformes multiples, successives, fragmentées sont comme les pièces d’un puzzle que l’analyse peut reconstituer. Comment ne pas voir, en effet, que l’affaiblissement programmé de la qualité professionnelle des enseignants est en lien étroit avec la nouvelle gestion des personnels axée sur la mobilité et la précarité ? Comment ne pas voir que la suppression des IUFM a les plus grands rapports avec l’autonomie des universités et la mise en marché de toutes les formations ? Comment ne pas voir que cette mise en cause de la formation des maîtres est le corrélat de la mise en place de tous les outils managériaux de contrôle des enseignants ?

 
Ce mode de contrôle par le management de la performance et par la pression concurrentielle est le principe qui donne aux réformes leur cohérence, du primaire jusqu’à l’université. Le choix néolibéral, c’est la gouvernance managériale plutôt que la formation humaine. D’où l’effort de constitution d’une hiérarchie intermédiaire disposée à faire fonctionner la nouvelle entreprise.
 »

 

Le débat n’est pas nouveau. Il est même récurrent. Il y a quelques années, dans un précédent rapport, la Cour des Comptes avait déjà souligné la nécessité d’une plus grande autonomie laissée aux établissements scolaires. Déjà aussi, le SNUipp avait formulé les mêmes critiques et le même refus de ce souhait d’autonomie.

Gageons que le prochain rapport de la Cour des Comptes rappellera cette nécessité et que le SNUipp lui répliquera par un copié-collé de ses précédentes réponses… « Je tourne en rond, je tourne en rond… » chante Zazie.

 

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5 mai 2010 3 05 /05 /mai /2010 21:12

 

Se définissant comme un « Think tank » indépendant, l’Institut Montaigne  vient de publier un rapport intitulé « vaincre l’échec à l’école primaire » dans lequel il dresse un état sans concessions de l’école et propose des solutions concrètes et opérationnelles.

Une partie importante de ce rapport de 140 pages concerne la « gouvernance impossible » et « l’absence de pilotage » de l’école primaire. Parmi les solutions proposées, le rapport plaide pour un statut de l’établissement et un vrai statut pour son directeur. Nous avons sélectionné quelques extraits qui intéressent particulièrement les directeurs d’école.

 

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Préambule

L’échec à l’école est un phénomène préoccupant pour notre pays et il se fabrique très tôt. "Quatre écoliers sur dix, soit environ 300 000 élèves, sortent du CM2 avec de graves lacunes : près de 200 000 d’entre eux ont des acquis fragiles et insuffisants en lecture, écriture et calcul ; plus de 100 000 n’ont pas la maîtrise des compétences de base dans ces domaines", pointait déjà le Haut Conseil de l’Education en 2007. Cette situation, loin de s’améliorer ou de se stabiliser, se dégrade depuis quinze ans.

Le niveau moyen des écoliers français se situe seulement dans la moyenne des pays de l’OCDE. Il se dégrade depuis deux décennies, au point que la prochaine vague de résultats de l’enquête PISA 2009 – publiés fin 2010 – est attendue avec beaucoup d’anxiété par le Ministère de l’Éducation nationale.

 

Notre école est incapable de « transformer efficacement les ressources en résultats ».

En 2001, Claude Thélot, spécialiste des systèmes éducatifs, avançait déjà que « les progrès de l’école ne sont plus à la hauteur des ressources insufflées, un palier est atteint, le problème ne relève plus du quantitatif, le système français rencontre certaines difficultés à évoluer ».

Chaque année assombrit davantage l’avenir de milliers d’élèves, déchire un peu plus notre tissu social et nous handicape dans la course à la connaissance. Ce Rapport contribue à la compréhension des mécanismes qui produisent l’échec à l’école. Il entend aussi éclairer la réflexion en montrant, à la lumière d’expériences internationales, qu’il n’y a pas de fatalité. Nos propositions peuvent aider à changer la donne.

 

Diagnostic

 

L’École de la République est organisée en fonction des besoins des adultes, pas de ceux des enfants.

1. Un calendrier scolaire beaucoup trop stressant

2. Un système bancal : l’échec de l’organisation en cycles

3. Le redoublement : inutile et dangereux !

4. L’efficacité contestable de l’aide aux élèves en difficulté

 

Le rôle des enseignants

 

Formation initiale et continue, recrutement, rémunération, mérite, management, évolution de carrière, évaluation, reporting, performance… L’Éducation nationale continue d’ignorer les principes de base de gestion des carrières, de motivation des individus, de performance des organisations… Elle oscille entre ignorance, indifférence, résistance passive et hostilité ouverte…

 

Une gouvernance impossible ou l’absence de pilotage à tous les niveaux

 

Qui est responsable de la dégradation des résultats de notre école ? Chercher des responsabilités et proposer des actions concrètes afin d’y porter remède est un exercice vain… En effet, ni le ministre ni son administration ne sont en mesure d’organiser un pilotage du système.

Ni le rôle, ni les responsabilités des directeurs d’école ne sont clairs. Ces derniers souffrent systématiquement d’un manque d’autorité sur leurs collègues. Imagine-t-on un instant un collège fonctionner sans un principal ou un lycée sans un proviseur ? Cette vision a de quoi effrayer… C’est pourtant celle que renvoie le premier degré, c’est-à-dire l’étage où se construisent les bases de la réussite ou de l’échec scolaire pour des classes d’âge entières…

Quant aux inspecteurs, ils ne sont pas assez nombreux pour assumer leur mission et sont contraints de déployer leurs activités en sacrifiant le plus souvent la formation pédagogique comme l’évaluation des enseignants.

Il est urgent de s’attaquer à cette situation qui fait de la première marche de notre système scolaire un corps ingouvernable.

 

Des écoles sans pilote

 

Qu’est-ce qui distingue un directeur d’école de ses collègues de l’enseignement secondaire ?

• le premier organise « le fonctionnement des écoles par le biais des différents conseils (conseil des maîtres de cycles, maîtres, école) »;

• ses collègues représentent l’État et dirigent leur établissement.

Le directeur d’école primaire ne dispose ni de l’autorité lui permettant d’assumer une réelle responsabilité pédagogique, ni des moyens suffisants pour remplir ses responsabilités administratives. Il ne dispose pas non plus d’une reconnaissance statutaire : il n’est « ni franchement un pair ni vraiment un supérieur ».

Il est en revanche soumis à l’autorité des « deux vrais responsables institutionnels de l’école, l’inspecteur de la circonscription, représentant l’État, et le maire de la commune, propriétaire des lieux et employeur des personnels non enseignants ». Ses responsabilités sont pourtant croissantes en matière administrative, pédagogique et partenariale (interlocuteur des autorités locales). Jongler avec ces trois tâches est d’autant plus complexe qu’il souffre d’une absence de légitimité pour assurer les responsabilités qui lui incombent.

Il faut bien noter que la plupart des syndicats de l’Éducation nationale sont hostiles à un pilotage renforcé des écoles, réticents à un « éclatement du corps des instituteurs et à la création d’un échelon hiérarchique intermédiaire entre l’inspecteur et l’enseignant ».

Cette crise silencieuse et larvée dure depuis plusieurs décennies. L’absence de reconnaissance de la fonction de directeur a donné lieu à un appel à la « grève administrative » entre 2000 et 2006.

Elle se prolonge encore aujourd’hui pour une minorité de directeurs. Les revendications d’ordre matériel ont été suivies d’effets, telles que l’amélioration du régime des décharges d’enseignements et l’augmentation des rémunérations. Néanmoins, la question de la création d’un corps spécifique des directeurs d’école n’est pas réglée. Une enquête commandée par le Groupement de défense des intérêts des directeurs parue en 2006 constate que « 93 % des directeurs seraient favorables à un nouveau statut, et que 73 % souhaitent qu’il débouche sur la création d’un nouveau corps. En outre cette enquête fait apparaître que 95 % des directeurs estiment que leur travail n’est pas reconnu par l’institution, et 47 % assurent que les syndicats ne défendent pas assez leurs revendications ».

Engager une réforme visant à la création d’un corps de directeur va de pair avec une évolution du statut des écoles en établissements publics d’enseignement primaire (EPEP), rendue possible par la loi du 13 août 2004 mais dont le décret d’application fait toujours défaut. Les fonctions de directeur doivent également être clarifiées, notamment à l’aune de la grande diversité qui existe d’une école à l’autre : gérer une école à trois classes ou à vingt classes n’implique par exemple pas la même charge de travail.

 

La fiction de l’inspection

 

Le rôle de cet échelon supérieur est pourtant essentiel. Au sein de leur circonscription (unité de base de l’école primaire), les inspecteurs de l’Éducation nationale (IEN) exercent leur mission d’encadrement « en assurant leurs trois missions traditionnelles : inspection, gestion, animation ». Ils inspectent, évaluent, notent les enseignants et contrôlent les écoles. Ils sont les garants des politiques nationales.

Face à la charge de travail, les IEN ne peuvent plus mener à bien toutes leurs missions. Ainsi, le HCE a-t-il constaté un recul du nombre d’inspections des enseignants face à leurs élèves. En outre, les IEN se reposent de plus en plus sur les directeurs d’école pour accomplir des tâches auxquelles ils ont moins de temps à consacrer. Préciser les missions des IEN et affiner les responsabilités incombant aux uns et aux autres permettrait de mieux piloter l’école primaire et d’accroître sa qualité.

En effet la gouvernance locale et la manière de diriger ont des incidences sur la réussite des élèves.

L’organisation administrative du premier degré n’est plus adaptée à ses besoins de pilotage de proximité. À structure et organisation constantes, on voit mal quelles améliorations vont pouvoir miraculeusement se produire…

 

La « liberté pédagogique » pour quoi faire ?

 

On l’a vu, notre système souffre d’un déficit de pilotage dû à la faiblesse organique des directeurs d’école et à la surcharge d’activité des inspecteurs. Dans un tel système, c’est l’enseignant qui prend in fine seul la décision des contenus qu’il va enseigner.

En effet, les programmes scolaires sont trop lourds pour être réalisés en 140 jours. Les enseignants sont donc contraints à un arbitrage entre les différents apprentissages. De nombreuses recherches ont confirmé les résultats d’une étude menée en 1996 sur les écarts dans l’utilisation du temps par les enseignants. D’autres travaux, à partir d’observations menées dans des classes de CE2, ont constaté de grandes variations dans le temps quotidiennement consacré aux élèves : la disponibilité d’un enseignant à l’autre pouvait varier jusqu’à 1 heure 30 minutes.

Des horaires qui varient du simple au double pour le français ou les mathématiques d’une classe à l’autre, 10 % des enseignants qui appliquent les horaires prescrits par les textes officiels… La « liberté pédagogique » n’est pas seulement un slogan. Mais quels sont les garde-fous assurant que cette liberté reste bien celle utile pour tenir compte des réalités rencontrées en classe ?

 

Un statut pour les écoles

 

L’école primaire ne jouit pas du même statut que le second degré. Elle n’est pas un établissement public, n’a aucune autonomie administrative ni financière et est pilotée depuis l’extérieur : « les écoles

sont, sur le plan administratif, de simples services municipaux ».

L’article 86 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales permet, en principe, à titre expérimental, la création d’un nouveau type d’établissement public : l’établissement public d’enseignement primaire (EPEP), doté de la personnalité morale et juridique et d’une autonomie administrative et financière. N’ayant pas été suivie de décret d’application, cette loi pourrait, cependant, marquer un tournant décisif dans la gouvernance de proximité dont a réellement besoin l’école primaire.

Cette modification en profondeur du statut de l’école par le biais de l’expérimentation permettrait de remédier au statut obsolète de notre premier degré et d’ajouter une pierre de plus dans l’édifice de l’efficacité que nous cherchons à bâtir pour le système éducatif français.

Des pays tels que la Belgique, l’Italie, la Suède et le Royaume-Uni octroient une autonomie très large, notamment pédagogique, à leurs écoles. Les Pays-Bas et la Finlande offrent un paysage un peu plus contrasté car leur situation dépend de « la volonté et de la pratique des autorités de tutelle des établissements » dans leur choix de délégation de pouvoir. À l’inverse, une minorité de pays accorde peu d’autonomie à ses établissements, c’est le cas de la France, mais aussi de l’Allemagne ou encore de la Grèce.

En France, « les enseignants n’ont pas de comptes à rendre aux chefs d’établissement, mais au ministère représenté par l’académie ou l’inspectorat ». Comme on l’a vu, les pouvoirs d’un directeur dans le premier degré sont relativement limités, par exemple il n’intervient pas dans le champ des méthodes d’enseignement à utiliser.

« L’accent est généralement porté sur l’idée que l’école doit fonctionner comme un ensemble cohérent. Pour cela le directeur doit être un « leader », il doit impulser une dynamique, fixer des buts communs, être très présent, exercer un rôle à la fois pédagogique et administratif ».

En France, une telle « culture de la mobilisation » n’est pas évidente, car elle se heurte à certaines règles de fonctionnement de l’Éducation nationale et à certains éléments de la culture enseignante. Assez individualistes, les enseignants estiment que « passer d’une logique de la classe à une logique de l’établissement équivaut (…) à une perte d’autonomie et implique quasiment une autre définition du rôle professionnel ».

 

 

Les propositions de l’Institut Montaigne pour vaincre l’échec scolaire

 

L’organisation scolaire

1 – Respecter l’organisation de l’école en cycles

2 – Réduire drastiquement le nombre de redoublements

3 – Prendre réellement en charge les élèves en difficulté

 

Le temps des enfants

4 – Revenir immédiatement à une semaine de 5 jours de travail, incluant le mercredi

5 – Rendre l’année scolaire moins compacte et pour ce faire l’allonger d’au moins deux semaines

 

Le métier de professeur des écoles

6 – Renforcer la communication autour du métier d’enseignant et mettre en œuvre un dispositif incitatif pour les candidats à cette profession

7 – Mettre en place des formations en alternance selon la formule de l’apprentissage, pour accéder au métier d’enseignant

8 – Améliorer la politique salariale pratiquée en début de carrière, afin d’inciter les personnes les plus compétentes et les plus performantes à devenir professeur des écoles

9 – Mettre en place des dispositifs contraignants pour assurer l’obligation annuelle de formation continue des enseignants en enrichissant la carte des formations comme en pénalisant ceux qui se soustraient à ce devoir

 

L’organisation de l’école

10 – Prendre le décret d’application pour la création d’établissements publics d’enseignement primaire (EPEP) expérimentaux tel que prévu par la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004.

Dans la Troisième note de synthèse sur la mise en œuvre de la réforme de l’enseignement primaire, le ministère plaide pour la création d’établissements publics d’enseignement primaire : « la création de l’EPEP donnerait aux inspecteurs un relais au sein de l’école sur les questions d’organisation et d’administration et elle leur permettrait de retrouver du temps pour le pilotage pédagogique et l’encadrement personnalisé des enseignants ».

À la différence du ministère de l’Éducation nationale, nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de donner davantage de pouvoir aux inspecteurs (IEN), bien au contraire ! L’enjeu est bien plutôt de permettre aux établissements de construire véritablement leur identité et leur projet pédagogique dans l’intérêt des enfants. C’est pourquoi l’Institut Montaigne propose également la mise en place d’une gouvernance de l’établissement et d’un véritable statut pour les directeurs d’école.

11 – Sélectionner et former des directeurs d’écoles de qualité exerçant un réel pouvoir de pilotage de leur établissement.

Il faut mieux définir le rôle et les responsabilités des directeurs d’école :

• établir les objectifs globaux de l’établissement, suivre leur réalisation et assurer leur évaluation ;

• procéder au recrutement des membres de l’équipe pédagogique à partir des viviers d’enseignants reçus aux concours ou en situation de mobilité ;

• assurer l’animation et la direction des équipes afin de fixer et d’évaluer régulièrement les objectifs pédagogiques au cours des conseils ;

• garantir un socle pédagogique minimum assurant un certain volume d’heures de français et de mathématiques. En effet, malgré les circulaires actuelles précisant les répartitions horaires, trop souvent elles ne sont pas respectées ;

• assurer la gestion financière et du personnel ;

• établir des collaborations avec d’autres institutions.

La création de ce statut nécessite une professionnalisation du recrutement des directeurs d’école. Leurs responsabilités nouvelles et étendues impliquent de reconnaître ceux dont les performances le méritent et de les récompenser – pourquoi pas à travers une part variable de la rémunération.

12 – Revoir complètement le rôle des Inspecteurs de l’Éducation nationale (IEN)

Leur mission doit se concentrer sur des objectifs pédagogiques, à savoir l’inspection des enseignants basée sur l’évaluation des élèves (afin d’évaluer les enseignants à partir des élèves) et la formation continue des enseignants, notamment afin de lutter contre l’échec scolaire.

13 – D’ici 2012, et dans le cadre de la mise en œuvre de la proposition n° 10, créer des EPEP qui permettent des expérimentations dans les écoles primaires, et notamment dans les ZEP, afin d’en faire un bilan à grande échelle avant d’étendre ce dispositif sur l’ensemble du territoire.

 

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Un « think tank » est une institution de « droit privé », regroupant des experts et des professionnels soucieux de réfléchir et de faire des études et des propositions dans le domaine des politiques publiques.

 

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29 avril 2010 4 29 /04 /avril /2010 16:44

 

S’il est maintenant admis par les responsables politiques (ministres, parlementaires, chargés de missions, IGEN…) que la « fonction » de directeur d’école est devenue un « métier » à part entière, il est navrant de constater que de grosses résistances subsistent encore, notamment chez les syndicats enseignants.

Politiquement frileux, aucun des différents ministres de l’Education n’a osé affronter ces résistances (oppositions parfois) qui sont un frein à une véritable reconnaissance institutionnelle. Or, cette reconnaissance institutionnelle passe par un statut juridique de directeur d’école fortement réclamé par 93 % des collègues.

 

Ce statut doit-il s’accompagner de la création d’un corps de directeurs d’école ? Effectivement, la question du statut peut aller de pair avec celle de la création d’un nouveau corps. Nouveau métier, nouveau corps, nouveau statut... Nous sommes nombreux à le penser et à le souhaiter. Hélas, nous avons toutes raisons de penser que ce n’est plus possible. En effet, c’est à contre-courant de la restructuration de la fonction publique qui, dans le cadre de la modernisation de l’Etat, procède à une fusion des corps existants et à leur regroupement en grandes filières de la « fonction publique de métiers ».

C’est ce que nous avions déjà indiqué, le 12 mai 2008, dans un article intitulé « La création d'un corps des directeurs d'école : hautement improbable ». Nous rappelions alors la volonté du gouvernement de réduire le « déterminisme » lié au statut de l’agent et simplifier l’organisation statutaire de la fonction publique de l’État.

 

Nous écrivions aussi :

 

« En lieu et place des quelque 700 unités statutaires actuelles de l'Etat (plus de 500 corps et environ 150 statuts d’emplois) relevant du statut général (c’est-à-dire hors militaires, magistrats judiciaires et agents des assemblées parlementaires), il est proposé de mettre en place un nombre restreint de « cadres statutaires » regroupés en quelques grandes filières professionnelles. Les actuels corps seraient fusionnés pour constituer ces nouveaux cadres statutaires. Les statuts d’emplois seraient supprimés. Chaque cadre serait doté d’un statut pris par décret.

Il est possible d’identifier sept filières professionnelles : filière d’administration générale ; filière financière et fiscale ; filière sociale ; filière de l’éducation et de la recherche ; filière culturelle ; filière technique ; filière de la sécurité.

Comme dans la fonction publique territoriale, le concept de filière professionnelle n’aurait pas de portée juridique. Un décret unique pourrait fixer les statuts de l’ensemble des cadres statutaires de chaque filière.

Les agents des cadres statutaires de l'ensemble des filières professionnelles auraient vocation à exercer leurs fonctions dans toutes les administrations (même si la correspondance entre certains cadres statutaires et certaines administrations serait plus marquée : tel est notamment le cas pour la filière de l'éducation). En effet, contrairement aux corps actuels qui sont, en général, liés à un ministère donné, un cadre statutaire correspondrait, on l'a dit, à un ensemble de qualifications et de métiers pouvant être exercés dans l'ensemble des administrations ».

 

Deux ans plus tard, où en est cette réforme ?

Un « point d'étape du programme de fusion des corps dans la fonction publique » a permis de mesurer le degré d’avancement de la réforme. Silencieusement, dans le cadre de la RGPP et appuyée sur le « livre blanc sur l’avenir de la fonction publique », la réforme se met en place. En avril 2009, il fut même décidé de donner un coup d’accélérateur aux fusions de corps et de cadres d’emplois.

 

« Depuis 2005, le Gouvernement a conduit un programme de fusion de corps important permettant d'ici au 1er janvier 2010 de passer de 685 à 380 corps :

 

-       305 corps auront été supprimés entre 2005 et 2010 soit près de 50 % de réduction (la quasi-totalité est déjà effective)

-       Plus de 80% des fusions ont concerné les catégories C (254 sur les 305) dont le nombre de corps a lui même été réduit de 80 %.

 

Au 1er janvier 2010, la Fonction publique de l'Etat se décompose en 380 corps dont :

-       Catégorie A : 223 (60 %)   

-       Catégorie B : 91 (25 %)

-       Catégorie C : 66 (15 %)

 

La réduction du nombre de corps a permis que la Fonction publique de l'Etat concentre aujourd'hui 90 % de ses effectifs sur 140 corps. C'était plus de deux fois plus en 2005 (340 corps). En revanche, 124 corps comptent moins de 150 agents chacun. »

 

Nous sommes actuellement dans la mise en œuvre de la troisième orientation du Livre Blanc ("refonder et simplifier l'organisation statutaire générale pour construire une fonction publique de métiers") qui devrait aboutir à la fusion de corps et d'extinction de corps (notamment les plus petits).

 

Dans ces conditions, il semble vain de réclamer la création d’un corps spécifique de directeurs du 1er degré. En bonne logique, dans le cadre du regroupement des métiers, la reconnaissance statutaire devrait plutôt s’accompagner d’un reversement des directeurs d’école dans le corps des personnels de direction de l’Education nationale.

Ce corps, mis en place par le décret « René Monory » no 88-343 du 11 avril 1988 pour répondre à la situation nouvelle créée par les lois de décentralisation (1982-1983), comprend les proviseurs, les principaux mais aussi leurs adjoints. Les directeurs d'établissements d'éducation adaptée et spécialisée (EREA – ERPD) appartiennent souvent au corps des personnels de direction de l'éducation nationale.

 

« Un corps unique affirmerait une reconnaissance institutionnelle indispensable à une égale reconnaissance des diverses tâches ». Telle est la proposition de la CFDT pour les différents cadres d’emplois d’inspecteurs. Ne pourrait-on appliquer ce principe aux directeurs d’école dont le métier s’apparente de plus en plus à celui des chefs d’établissement ?

Ne pourrait-on également, comme le fait le SGEN-CFDT pour les inspecteurs, revendiquer « un concours unique pour un corps unique, adapté aux spécificités de la fonction » ?

 

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6 avril 2010 2 06 /04 /avril /2010 22:18

 

Inspecteur de l’Education nationale pendant 30 ans et ancien responsable du syndicat des inspecteurs SI-EN Unsa Nord, Pierre Frackowiak connaît parfaitement les rouages de l’inspection.

Le 10 février dernier, nous avons consacré à un article concernant ses craintes de voir « des IEN à la tête des EPEP ».

Aujourd’hui, Pierre Frackowiak publie une nouvelle tribune dans laquelle il réagit à une note destinée aux IEN et qui leur demande d'évaluer la capacité à "agir en fonctionnaire" des futurs enseignants. Une formule qui lui semble vague et dangereuse. S'agit-il de faire des enseignants des robots obéissants ? Et des inspecteurs des petits chefs ?

 

Nous avons décidé de retranscrire les grandes lignes de cette tribune publiée dans « le café pédagogique ».

 

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Piloter l’obéissance. Un nouveau concept pour les inspecteurs ?

 

Une note officielle, « à l’usage exclusif des inspecteurs de l’Education Nationale » présente « les observables pour l’émission de l’avis de titularisation des professeurs ». Sa première partie, relative aux obligations du fonctionnaire, ne manque pas de surprendre au point de laisser penser que le document est un poisson d’avril. Nous vérifions donc son authenticité mais il est évident que les indications données paraissent crédibles tant elles sont conformes à l’air du temps gouvernemental, aux référentiels de compétences récemment publiés et aux injonctions répétées sur l’air « du fonctionnaire qui fonctionne » et de discours publics du ministre sur l’obligation d’obéissance des enseignants. Si les critères présentés concernent les conditions de titularisation des enseignants nouvellement recrutés, il est évident qu’ils s’appliquent à l’ensemble des enseignants.

 

1) Agir en fonctionnaire de l’Etat et de façon éthique et responsable - Répondre aux grandes obligations du fonctionnaire :

 

Devoir d’obéissance

-       Ponctualité

-       Respect des horaires

-       Respect des contenus et des programmes

-       Enseignement de toutes les disciplines

-       Autres obligations de service (assiduité, service de surveillance, entrée, récréation…)

 

Discrétion professionnelle

-       Respect et confidentialité des informations détenues sur les familles et les élèves

-       Réserve et absence de mise en cause des fonctionnements de l’institution et de ses personnels

 

Comportements inadaptés

-       Contacts physiques avec l’élève, ni coups ni caresses

-       Manque de respect aux élèves, par les mots, les gestes, ou même l’humour

-       Manquement à l’autorité, dérives ou défauts qui peuvent causer la mise en danger des élèves, bousculades, déplacements désordonnés, défaut de surveillance, manipulation d’objets dangereux…

 

Après les sanctions contre les désobéisseurs, après la multiplication des contrôles de l’exécution des ordres descendant des tuyaux d’orgue de la hiérarchie, parfois renforcés ou alourdis à chacun des niveaux intermédiaires (base élèves, aide individualisée selon un modèle officiel implicite, évaluationnite oppressante, SMA, exigences locales paperassières…), le ministère s’est donné une période d’observation des réactions avant de jeter ses dés. Le développement de l’autoritarisme analysé dans une tribune précédente se confirme, se formalise, s’impose. Et il faut bien dire que les réactions syndicales et politiques ont été bien molles pour le premier degré sur toutes les questions qualitatives, pédagogiques, morales, la lutte contre les suppressions de postes trustant toute l’énergie militante ou ce qu’il en reste, occultant le plus souvent les questions fondamentales de la conception du système éducatif, du choix de société à construire, d’une vision de « l’honnête homme » du 21ème siècle.

 

Désormais, il faut obéir. Il est interdit de contester, de critiquer, de proposer. La loyauté, c’est l’obéissance. On le voyait arriver depuis 2007 avec la perspective de la société ultra libérale autoritaire dont la mise en œuvre se poursuit inexorablement, on ne pouvait pas imaginer que ce serait à ce point. Société de l’individualisme exacerbé, de la compétition, de la loi du plus fort,  des gagnants. Avec un retour en force de l’idée de la fatalité de l’échec malgré tous les efforts qui sont faits. L’exemple de l’aide individualisée, la bonne conscience du pouvoir, en est une illustration qui a pu piéger bien des acteurs éducatifs de bonne foi.

 

Le premier devoir des inspecteurs sera donc de contrôler le respect du devoir d’obéissance. Les plus zélés sont sans doute déjà au travail pour élaborer des grilles d’indicateurs d’obéissance afin de pouvoir en tirer des statistiques, des courbes et des camemberts. Ils les proposeront à l’échelon supérieur pour normaliser les pratiques. Le goût pour les usines à gaz inutiles est devenu une caractéristique des cadres technicistes depuis deux ou trois ans, leur effet essentiel est toujours d’alourdir les tâches administratives des enseignants et de les détourner de la réflexion pédagogique. On trouvera sans doute dans les grilles la déférence pour les échelons supérieurs, les traces de discours de propagande gouvernementale aux parents ou les témoignages de parents d’élèves incités à la délation par SOS Education, des coupures de presse mettant en évidence des prises de position citoyennes libres, les froncements de sourcils et les doutes manifestés en réunion pédagogique, les retards dans les renvois des évaluations, enquêtes et sondages, etc. Un autre  volet comprendra les méthodes d’apprentissage de l’obéissance chez les élèves. Il s’agit de former des citoyens obéissants et il vaut mieux commencer à la maternelle. Les « garde à vous » et « à vos rangs fixe » pourront réapparaître. Peut-être pas les fusils en bois de Jules Ferry puisque l’Alsace et la Lorraine ont été reconquises, mais des modes de pensée conformistes et l’art de se courber devant l’autorité.

 

Ces mesures, parfaitement cohérentes avec les nouveaux vieux programmes et avec le déni systématique, idéologique, de la pédagogie, sont une nouvelle étape sur la voie du projet libéral. Au moindre incident, un coup de menton, un engagement solennel qui ne coûte rien, des instructions naturellement très fermes, des tableaux et des grilles pour hier, des feuilles de route pour demain...

 

Pour l’encadrement intermédiaire qui semble désormais majoritairement convaincu de la possibilité de piloter le système sans carburant et sans cap, une difficulté surgit néanmoins : comment piloter l’obéissance ? On peut la contrôler assez facilement avec un peu de pratique mais comment l’améliorer sans faire appel à la formation initiale et continue qui disparaît. Faute de cours d’obéissance, c’est très simple : il faut aller chercher les modèles militaires. « Allez, allez, contravention » ou suppression des primes ! « Allez, allez, pas de discussion, exécution ou punition ! J’connais l’métier ! »  La tacatatactique du gendarme, il n’y a que ça de vrai. On croise cette méthode avec celles du pilotage par les résultats chère au monde de l’entreprise et l’on a un système moderne en apparence qui accroit le nombre de victimes et les transforme en coupables, qui détériore le vivre ensemble comme l’a mis en évidence le rapport du médiateur, qui génère de la violence en prétendant la combattre. Les pilotes ne sont-ils pas nécessairement au moins des adjudants ou des lieutenants ? N’ont-ils pas toujours raison et ne connaissent-ils pas tout ça par cœur ?

 

Mais qui a inscrit la liberté pédagogique dans la loi ? Qui a dit que l’éducation est synonyme de liberté, d’intelligence, de pensée divergente ? Qui a évoqué l’éducation de l’esprit critique, l’éducation à la responsabilité plutôt qu’à la vassalité ? Qui ose encore parler d’une école émancipatrice dans une société démocratique ?

 

NB Il en sera de même pour les conseillers pédagogiques… avec des items qui seront bien difficiles à objectiver… et comme, au nom de l’obéissance, on n’aura plus le droit de contester, le syndrome France télécom ne pourra que se développer dans l’entreprise Ed Nat !

 

Stage en responsabilité filé – Evaluation des compétences :

                                                         

1 : Agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable

6 et 7. Connaître l’organisation de l’Ecole et le projet d’école

8. Participer à la vie de l’école

9. Se situer dans la hiérarchie et l’organisation de l’administration

10. Coopérer avec les partenaires de l’école

11. Exercer une autorité légitime dans le respect de la déontologie

12. Repérer les signes de difficultés des élèves (sociales, de santé, de comportement)

13. Promouvoir les valeurs de la République

14. Respecter les règles de déontologie

 

On peut se demander sur quels critères légitimes ces indicateurs seront jugés. Prenons l’exemple 13 « promouvoir les valeurs de la République ». Comment peut-on honnêtement en juger ? Comment sont-elles transmises et construites ? Personne ne le sait… Mais nul doute que les évaluateurs sauront évaluer…

 

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Si les IEN doivent évaluer les critères cités dans cette note, on voit mal comment ils pourront le faire. En effet, un IEN est-il en mesure de juger « la ponctualité » d’un enseignant, « son respect des horaires », « son assiduité » ou « son investissement dans les obligations de service » qui sont les siennes ? Comment évaluera-t-il « les comportements inadaptés » ? Il est plutôt rare que, le jour de son inspection, un enseignant soit en retard, se libère de ses obligations de service ou ait un comportement inadapté… Le risque et la probabilité ne sont-ils pas que l’IEN soit tenté de faire pression sur le directeur pour obtenir les informations nécessaires à son évaluation ?

L’absence de réaction de nos syndicats est surprenante. Habituellement, ne sont-ils pas prompts à dénoncer les risques de voir les directeurs se comporter en « p’tits chefs » ?

Récemment encore, le SE-Unsa a posé ses exigences et réclamé « l’impossibilité pour le directeur d’école d’être un supérieur hiérarchique », soit-il enseignant. « C’est un rempart important pour le SE et pour la profession, qui répond à une crainte épidermique des enseignants du premier degré de perdre leur indépendance » ? (Congrès de Brest – mars 2010)

Le SNUipp refuse, quant à lui, que le directeur devienne « un maillon hiérarchique, un relais de l’IEN au sein de l’école… ». Il s’oppose à un statut qui ne peut être, à ses yeux, qu’à « vocation hiérarchique pour la direction d’école ».

Or, comme le souligne Pierre Frackowiak, « …les réactions syndicales et politiques ont été bien molles pour le premier degré sur toutes les questions qualitatives, pédagogiques, morales… ». Les syndicats du primaire ne revendiqueraient-ils « l'indépendance » des enseignants qu’à l’égard des seuls directeurs ? Seraient-ils prêts à en minimiser l'importance face à l'autorité d'un IEN ?

De là à penser que les réactions syndicales ne valent que pour s’opposer à un éventuel statut de directeur plutôt que pour défendre le principe d’indépendance si cher à « la profession »...

 

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22 février 2010 1 22 /02 /février /2010 22:02

Nous avons souvent eu l’occasion de l’écrire sur ce blog : les divers gouvernements de ces dernières années n’ont fait qu’aggraver la crise de l’école. La politique conduite par les différents ministres n’est que la résultante de choix budgétaires et n’est en rien dictée par une quelconque volonté d’améliorer le fonctionnement de l’institution.

Nous l’avons souvent déploré : quasiment toutes les mesures prises ces dernières années n’ont d’autre objectif que de réduire le nombre de postes. De la semaine de quatre jours à l’aide personnalisée, de la suppression des postes de RASED à la formation des enseignants…etc. tout n’est que calcul imposé par la RGPP et la décision dogmatique de ne remplacer qu’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.

 

Le 18 février dernier, sur France Inter, Guillaume Duval, rédacteur en chef du mensuel « Alternatives économiques » a consacré sa chronique du matin à la crise de l’école. Nous avons décidé de la retranscrire dans son intégralité.

 

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« Ces derniers jours l’école a beaucoup défrayé la chronique. Surtout autour de l’insécurité avec une série d’incidents souvent montés en épingle par les médias. Il n’empêche ces problèmes illustrent aussi un malaise plus profond qui traduit la dévalorisation de l’école. Elle a cessé en effet d’être une priorité pour ceux qui nous gouvernent.

L’insécurité s’accroît à l’école ? Ce n’est pas surprenant : en 2004 l’Education nationale employait encore 50 000 personnes pour assurer la « surveillance » sous différents statuts. Aujourd’hui ils ne sont plus que 28 000, quasiment moitié moins… Mais ce qui se passe sur ce plan ne fait qu’illustrer un désinvestissement plus général. La part des richesses produites chaque année, autrement dit le fameux PIB, consacrée à l’éducation était de 7,6 % en 1996. En 2008 elle n’était plus que de 6,6 %, en baisse une fois de plus par rapport à 2007. Eric Woerth veut limiter à l’avenir la part des dépenses publiques dans le PIB. En matière d’éducation c’est déjà le cas chaque année depuis près de 15 ans…

Que déduire de cette baisse des dépenses d’éducation ?

1 point de PIB en moins, cela parait sans doute très abstrait pour nos auditeurs. Cela veut dire en fait qu’il manque 20 milliards d’euros au budget de l’éducation pour que l’effort de la nation soit équivalent à ce qu’il était en 1996. 20 milliards en moins sur 129 milliards c’est un trou de 15 %, un euro sur six. Ces 20 milliards représentent plus de dix fois ce que l’Etat dépense chaque année pour son action à l’étranger ou encore deux fois ce que dépense le très grand ministère de Jean Louis Borloo pour l’écologie, le développement et l’aménagement durable… Cela se traduit par des reculs très significatifs : en 1996, 84 % des jeunes de 18 ans étaient scolarisés, on est redescendu aujourd’hui en dessous de 80 %. Et à 20 ans la chute est encore plus prononcée, de l’ordre de 6 points… Tandis que 150 000 jeunes sortent toujours du système scolaire sans aucun diplôme. L’école française apparaît aussi dans les comparaisons internationales menées par l’OCDE comme une de celles qui reproduisent le plus les inégalités sociales…

Est-ce seulement une question d’argent ?

Ces difficultés ne relèvent évidemment pas seulement de questions de moyens. Les racines du mal sont plus complexes et profondes. Il n’empêche, il n’existe aucune possibilité d’améliorer les choses dans un contexte d’austérité budgétaire accrue. Or, l’école a été la principale cible des politiques de maîtrise des dépenses publiques ces dernières années. En 2010 sur les 30 000 suppressions d’emplois publics programmées par le gouvernement, 16 000, plus de la moitié, sont prévues dans l’Education. Avec des conséquences absurdes comme la réforme de la formation des enseignants. On va les recruter un an plus tard et les envoyer faire cours sans qu’ils aient suivi quasiment aucune formation pédagogique ni stages pratiques. Simplement parce que cela permettra d’économiser quelques milliers de postes…

Ces aberrations illustrent un contresens total sur la notion d’« investissements d’avenir » régulièrement mise en avant par le gouvernement : il vient en particulier de lancer une (coûteuse) campagne de communication pour justifier le « grand emprunt ». Celui-ci « n’est pas une dépense courante, affirme cette campagne, C’est un programme qui… financera des investissements dans des secteurs d’avenir… ». Mais cette distinction entre « dépenses courantes » et « investissements d’avenir» n’a aucun sens dans des sociétés de la connaissance. L’investissement a cessé en effet de s’y mesurer en tonnes d’acier ou de béton. En s’attaquant en priorité aux dépenses d’éducation, qui sont censées être des dépenses courantes, le gouvernement hypothèque au contraire lourdement l’avenir de notre société et de notre économie. »

 

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Ainsi que nous l’écrivions le 17 décembre 2009 dans un article intitulé « La règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux dans le collimateur de la Cour des Comptes » ce sont près de 140 000 emplois d’enseignants qui ont disparu entre 2000 et 2009.

Dans ce rapport, Philippe Seguin déclarait : « Les personnels de l'État, des collectivités et des hôpitaux sont la principale force du service public. Nous ne pouvons leur offrir comme seule perspective une rationalisation froide et permanente ».

Il déplorait que « cette règle forfaitaire de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux "résulte d'une démarche purement quantitative", sans évaluer la qualité des missions de service public ».

Et d’ajouter : « Au moment où l’Etat réussit à trouver trois milliards pour les restaurateurs, il fait payer une addition particulièrement salée à l’Education nationale : les 16 000 emplois économisés représentent une économie de 500 millions d’euros. »

 

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10 février 2010 3 10 /02 /février /2010 08:12

Inspecteur de l'Education nationale durant 30 ans dans le Nord, Pierre Frackowiak a exercé des responsabilités syndicales académiques et nationales. Aujourd’hui inspecteur honoraire, il dresse le portrait de la dégradation de l’image du corps d’inspection dans une tribune intitulée "Les inspecteurs de l’Education Nationale : Un grand corps malade".
Nous reproduisons de larges extraits des propos de Pierre Frackowiak. 

 

"La situation s’est gravement détériorée. L’image du corps, son impact, sa crédibilité sont devenus si faibles que bien des spécialistes s’interrogent sur son avenir et se demandent même si les mesures prises depuis quelques années, mettant les inspecteurs sciemment dans les pires difficultés de leur histoire, ne sont pas inscrites dans la perspective d’une mort annoncée, parfaitement cohérente avec le contexte de réduction de la dépense publique et de libéralisation du système. Ils sont malheureusement les seuls à ne pas s’en rendre compte et à « faire semblant » en avalant, parfois goulument, toutes les couleuvres. La suppression de leur formation initiale, les conditions de leur recrutement qui n’a aujourd’hui plus rien à voir avec toute idée de concours républicain, l’introduction du mérite dans leur rémunération, le mépris avec lequel ils sont considérés dans les séminaires inter académiques où ils sont ouvertement traités comme des valets ou des exécutants interdits de pensée, faux experts jamais consultés, producteurs de milliers de rapports ignorés de l’institution, rendent leur position infiniment moins confortable encore qu’en 2003.

Comme dans les couples en perdition, ils sont les derniers à savoir. Réfugiés dans leur territoire, ils ignorent totalement ce que pensent réellement les enseignants de leur action et de leur conception du métier. Une tradition infantilisante perdure malgré le temps, le changement des générations et l’élévation du niveau de recrutement des enseignants. On ne dit pas à un inspecteur que l’on n’est pas d’accord, qu’il a tort, qu’il dit n’importe quoi, que l’on s’ennuie dans ses conférences, qu’il affirme le contraire de ce qu’il disait quelques années auparavant, que ses attitudes relèvent de l’autoritarisme et du manque de respect… Cela ne se fait toujours pas. Même les syndicats d’enseignants, régulièrement interpellés par leur base sont très réservés et recherchent systématiquement des arrangements discrets en cas de conflit, considérant qu’il vaut mieux ce système hiérarchique qu’un transfert du pouvoir à des élus ou à aux parents."

 

Pierre Frackowiak ne ménage pas ses critiques à l’égard des conditions d’exercice du métier d’inspecteur :

 

     L’annonce de l’inspection.

"La loi impose que les enseignants soient prévenus, ce qui n’était pas le cas naguère. Or, la pratique la plus répandue, dont on me dit qu’elle était recommandée à l’ESEN (école supérieure de l’Education Nationale) est d’annoncer aux victimes qu’elles seront inspectées entre le 1er et le 8, voire entre le 1er et le 15. On justifierait ce détournement de la loi par la nécessité de surprendre pour observer les réalités. Or, outre le fait que tout enseignant peut toujours garder en réserve une belle séquence spécialement préparée pour l’inspection, la méthode est particulièrement scandaleuse. Elle assimile le métier d’inspecteur à un travail de policier contrôleur de flagrants délits". […]

 

     Le délai des renvois des rapports.

"Surprise et « épluchée » dans les moindres détails, effrayée de voir une petite bête dégagée d’un dossier, la victime attend parfois des semaines, voire des mois, son rapport d’inspection sans que personne n’ose protester. L’institution prouve ainsi, s’il en est besoin, que le rapport n’a aucune importance, hors la note. Ceci explique aussi que depuis toujours, les milliers de rapports et de notices d’inspection sont « archivés » sans être exploités pour des regards macroscopiques sur le fonctionnement du système". […]

 

     Les certitudes annoncées en entretien.

"Peu de dialogue vrai. Peu de pensée divergente. L’inspecteur sait tout par cœur". […]

 

     L’incapacité de prouver son expertise.

"Dominique Senore dans son excellent livre « Pour une éthique de l’inspection » indiquait comme règle fondamentale : « Ne demande pas à l’enseignant de faire ce que tu ne saurais pas faire toi-même » et Philippe Meirieu rappelle souvent que la meilleure manière de prouver son expertise est de prendre la classe. Mais vous n’y pensez pas, ma chère… Alors, quand les publics concernés savent que l’inspecteur était réputé pour son incapacité à faire l’école, on peut imaginer le crédit réel de l’intéressé condamné à faire de l’autoritarisme pour asseoir un pouvoir factice. Cause toujours !"

 

Des dérives mortifères

"Le pilotage par les résultats sans moyens de régulation, sans formation, sans réflexion fondamentale sur la transposition de modèles économiques au monde de l’éducation, sans culture, conduit le système à la catastrophe. Mais le snobisme fait rage. Statistiques, courbes, camemberts, feuilles de route, évaluationnite aigue et développement effarant du « teaching for testing », cycle infernal évaluation pointilliste/remédiation illusoire, culpabilisation des enseignants et des élèves, absence de prise en compte sérieuse de la dimension sociale des problèmes. Les yeux rivés sur l’ordinateur, on traque désormais les marges possibles de progrès à moyens réduits. Le règne de la paperasse, de l’administratisation, de la pensée unique, de la répression contre les désobéisseurs et contre l’intelligence collective, est arrivé […] Les enseignants contestent-ils l’aide personnalisée, détournent-ils le dispositif ? Ils font de l’idéologie. Beurk. Le pouvoir lui n’en fait évidemment pas. Le malaise grandit dans les écoles, les enseignants perdent tout enthousiasme et se découragent et souffrent ? Basta. Qu’ils obéissent et fassent comme on leur dit de faire ! Et dans mon territoire, tout va bien. L’académie de médecine condamne sévèrement la semaine de 4 jours et la lourdeur accrue de la journée scolaire, Elle fait de la politique ! Ah, pourtant, généralement, l’académie de médecine ne se distingue pas particulièrement par ses aspirations révolutionnaires. Bon, alors, n’en parlons pas, enterrons le rapport. Les tonnes de paperasse rendues, les heures de réunions inutiles sont critiquées ? Peu importe. Les tableaux sont faits et renvoyés à l’échelon supérieur. Les statistiques sont faites…Les apparences sont sauves…"

 

La réorganisation des écoles avec des directeurs responsables…


"Le corps, décrédibilisé, semble condamné par de nombreux observateurs et experts. La survie peut encore durer quelques années selon les circonstances, avec la poursuite de la baisse du niveau et de la diversité du recrutement pour en justifier la fin, avec une pseudo formation/formatage …

Un évènement attendu risque pourtant de bousculer les conforts illusoires. La réorganisation des écoles, avec des directeurs responsables, bousculera inévitablement les fonctionnements. Certes, c’est une vieille affaire. Des projets antérieurs avaient été abandonnés, projet de droite, les maîtres directeurs de M. Monory, projet de gauche, le rapport du recteur Claude Pair. On sait par ailleurs que l’une des difficultés majeures de la mise en œuvre de la grande loi d’orientation de 1989 a été que le rôle du directeur d’école, depuis lors chargé de l’animation des concertations, du projet d’établissement, de l’organisation des cycles, etc. n’avait pas fait l’objet des mesures qui auraient été nécessaires. On sait que les idées d’établissement public du premier degré sont toujours actives et qu’à droite comme à gauche, on considère généralement que cette question est incontournable et peut-être vitale. Il est évident que si un tel projet se met en place, les missions des inspecteurs seront mécaniquement remises en cause. Bizarrement cela pourrait être salutaire. Car cela imposerait une véritable réflexion sur l’évolution des missions de ce corps. Le directeur prendrait naturellement en charge des tâches administratives, d’animation, de gestion, de relation avec les collectivités qui incombaient aux IEN. Même le pouvoir terrible d’accorder des autorisations d’absence d’une demi-heure ou de quelques jours serait enlevé aux IEN.

Le métier pourrait alors évoluer vers des missions d’accompagnement pédagogique … mais dans un contexte de déni de la pédagogie, cela n’aurait guère de sens.

Il est plus probable qu’une partie des IEN  serait reversée vers les nouveaux postes de direction, certains en sont d’ailleurs assez proches dans leur conception du métier, et qu’une autre partie serait affectée à des missions d’évaluation du système en liaison avec les autres catégories d’inspecteurs, avec un complément de formation aux statistiques. L’inspection individuelle classique donnant de plus en plus des signes d’obsolescence, faute de réflexion collective du corps, serait probablement abandonnée.

Dans les deux cas, l’avenir n’est guère enthousiasmant, seuls les conseillers pédagogiques pourraient, comme c’est déjà massivement le cas depuis plusieurs années, être attirés par un petit galon supplémentaire" […].

  

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Les IEN en viendront-ils un jour à prendre la direction des EPEP ? Sauf à y être contraints, on voit mal des cadres ayant détenu une parcelle d’autorité hiérarchique par « délégation » rentrer dans le rang et demander la direction d’un établissement scolaire sur lequel ils n’auraient que peu de prise. Psychologiquement, on imagine également la difficulté de passer de la domination d’une circonscription au travail de terrain sans le moindre « pouvoir » auprès d’une équipe restreinte.

 

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