Le 8 mars dernier, dans un article intitulé « Direction d’école : le SNUipp en quête d’une crédibilité introuvable » nous avons attiré l’attention de nos lecteurs sur l’enquête en ligne lancée par le SNUipp et destinée « à laisser la parole à l’ensemble des directeurs et adjoints ».
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Nous écrivions alors :
Une enquête entachée d’une grossière erreur méthodologique
Destinée à l’ensemble des directeurs et adjoints, cette enquête nationale présente un inconvénient majeur qui la rend d’ores et déjà sujette à caution : elle ne présente aucune des garanties de fiabilité d’un véritable sondage.
En effet, cette enquête ne se conforme pas au standard méthodologique des enquêtes d’opinion dans la mesure où il est possible d’y répondre autant de fois que l’on veut depuis un même poste (aucun blocage des adresses IP). Rien à voir avec l’enquête commandée en 2006 par le GDID qui avait fait appel à un institut de sondages réputé (IFOP) et qui présentait toutes les assurances méthodologiques nécessaires pour fournir des résultats fiables.
En ne se donnant pas les moyens d’une enquête incontestable, le SNUipp ruine tous ses efforts de séduction déployés ces derniers temps pour afficher son intention de faire évoluer la « fonction » de directeur car, quels qu’ils soient, les résultats seront forcément affectés d’un doute. Doute d’autant plus fort que les deux précédentes enquêtes départementales (06 et 65) de ce syndicat étaient déjà entachées d’approximations, d’erreurs et d’incohérences qui leur ôtaient toute crédibilité.
Des résultats inexploitables
L’enquête présente un autre inconvénient de taille : elle est anonyme, ce qui n’est pas une faute en soi. Cependant, il deviendra impossible de différencier les réponses apportées par les directeurs et les adjoints puisque chacun aura le loisir de se faire passer pour qui bon lui semble et autant de fois qu’il le souhaitera. Comment imaginer que les auteurs de cette enquête n’y aient pas pensé ?
Force est constater que cette enquête ne peut se parer d’aucune valeur scientifique. Quels qu’en soient les résultats, l’exploitation qui en sera faite ne pourra donner lieu à aucune analyse crédible et incontestée. Et hélas, il est à craindre que comme les précédentes, cette consultation ne contribue un peu plus à semer le trouble sur les véritables intentions du SNUipp à l’égard des directeurs d’école.
Coup d’épée dans l’eau ou nouvelle manipulation ? Faudra-t-il attendre le mois de mai (publication des résultats) pour en avoir le cœur net ?
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Les résultats de cette enquête sont maintenant publics. Le SNUipp se félicite de la participation :
« Vous aviez la parole et vous vous en êtes saisi. Un peu plus de 9 250 réponses à l’enquête sur le fonctionnement et la direction d’école, voilà un beau succès [...] Cette participation conséquente est venue confirmer, s’il en était besoin, que la situation actuelle de plus en plus insatisfaisante nécessite de dépasser le simple constat. »
Le SNUipp poursuit : « S’il ne s’agit pas d’un sondage, le nombre de réponses qui correspond à une participation de près de 20% des écoles est inédit et donne une forte crédibilité à ces résultats qui soulignent l’urgence d’une ouverture de discussions avec le ministère. »
Précision inutile qui ne fait que renforcer le doute sur les analyses du syndicat. Rappelons que cette enquête était ouverte aux 320 000 enseignants du premier degré. Le questionnaire étant anonyme, il n’est pas possible de savoir combien d’enseignants d’une même école ont pu y répondre. Il n’est pas possible non plus d’affirmer que « le nombre de réponses correspond à une participation de près de 20% des écoles ».
En réalité, la seule analyse que l’on puisse faire à partir des chiffres annoncés concerne la participation. 9 250 réponses rapportées au nombre d’enseignants donne un taux de participation inférieur à 3 %.
Ce taux n’est d’ailleurs pas assuré dans la mesure où il est tout à fait possible que de nombreux enseignants aient répondu plusieurs fois. Plusieurs d’ailleurs, sur différents sites ou forums, ont déclaré avoir testé un vote multiple. En effet, comme nous le disions le 8 mars, aucun système de blocage n’a été mis en place pour empêcher quiconque de répondre plusieurs fois.
Certes, le SNUipp précise que « la vérification et l’éventuelle correction des multiples saisies de même origine a été effectuée sur la base des adresses IP. »
Là encore, précision inutile qui ne fait que confirmer l’impossibilité de connaître avec exactitude le nombre de répondants uniques, notamment parce que de nombreux « multi votants » ont pu le faire d’ordinateurs différents.
Relevons par ailleurs que si un seul vote a véritablement été retenu par adresse IP, le système a pénalisé tous les collègues qui souhaitaient donner leur avis à partir du même ordinateur de leur école.
Au final, combien de répondants uniques ? Combien d’écoles participantes ? Combien de véritables directeurs et de véritables adjoints ? Nous n’avons les réponses à aucune de ces questions.
Comme nous le disions également le 8 mars, le SNUipp aurait gagné à confier ce travail à un institut d’enquêtes d’opinions, comme il le fait parfois pour d’autres enquêtes. Il y aurait trouvé la garantie de résultats incontestables obtenus plus efficacement par le biais d’un sondage auprès d’un échantillon représentatif.
La méthodologie employée jette un doute sur la crédibilité de l’enquête. Trop d’incertitudes demeurent. Les résultats ne peuvent être considérés comme fiables. Dès lors, il nous semble tout à fait inutile de les commenter.