Dans le canton de Genève, la réorganisation de l'école primaire avance à grands pas. En septembre prochain, les 164 écoles du canton devraient constituer 94 établissements. Un directeur chapeautera chacun d'eux, à temps plein dans ceux regroupant seize classes et plus, à temps partieldans les autres. Les directeurs des plus grandes structures devraient être secondés par des maîtres adjoints. La création de six à huit postes de ce type est envisagée. «Certains établissements accueillent 600 élèves dans plusieurs bâtiments. Il paraît souhaitable que le directeur y soit épaulé. De plus, la présence d'un responsable dans chaque bâtiment devrait permettre d'éviter un effet capitale-périphérie», détaille Charles Beer. Enfin, une dizaine de secrétaires compléteront sans doute ce système.
Pour justifier ce qu'il a jadis nommé une révolution, le patron du DIP (Département de l'Instruction Publique) explique que «l'école est lieu de service public de très grande proximité». Pourtant, constate-t-il, au sein des établissements, «personne ne dirige, n'est apte à prendre de décision». Cette situation, il la juge désuète. A ses yeux, parents, élèves et enseignants ont besoin d'un responsable accessible et proche. Il en conclut que le système des vingt-cinq inspecteurs se partageant les écoles du canton «a vécu».
Hormis l'Association Refaire l'école (ARLE), cette refonte du système emporte l'adhésion de presque tous. L'argument principal de son président, André Duval, tient en une phrase. «Au lieu d'encadrer les enseignants, il serait plus utile de créer des appuis supplémentaires pour encadrer les élèves.» S'étonnant de la généralisation du système des directeurs, déjà en place dans les écoles en REP (Réseau d'enseignement prioritaire), «sans qu'une seule évaluation n'en ait été diligentée», il dénonce «la politique du fait accompli. C'est la même tactique qui avait été employée pour la rénovation».
Les députés sont séduits. Le parti libéral salue l'arrivée des directeurs, «une décision qui vise à renforcer l'autorité». Les socialistes sont peu ou prou du même avis. «Les directeurs gèreront les relations avec les parents. Il s'agit d'une bienvenue décentralisation du pouvoir.» Quant au financement de la mesure, il ne soulève pas d'objections. «Charles Beer a joué sur les doublons, sans rogner sur le personnel enseignant.» Le ministre relève qu'il a tenu ses deux promesses: procéder à une réforme «à zéro franc», et «maintenir le taux d'encadrement d'un adulte pour dix-sept élèves».
Nos voisins n'auraient-ils pas créé des EPEP un peu à la manière de monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir ? Partant des mêmes constats, «personne ne dirige, n'est apte à prendre de décision», nos gouvernants ne pourraient-ils s'inspirer du modèle gènevois ?